Berlinale | Critique : The Death of My Mother

Juliane accompagne sa mère Kerstin, 64 ans, condamnée par la maladie.

The Death of My Mother
Allemagne, 2022
De Jessica Krummacher

Durée : 2h15

Sortie : –

Note :

SANS NOUVELLES DE DIEU

The Death of My Mother débute par une fin, ou plutôt l’annonce d’une fin imminente : celle du décès de la mère de Julianne, atteinte d’une maladie incurable. Pour mettre un terme aux souffrances qu’elle endure, celle-ci a décidé d’arrêter de s’alimenter. Le médecin ne prend pas de détours pour parler du décès imminent de maman. La réalisatrice Jessica Krummacher, qui s’est inspirée d’un épisode de sa propre vie familiale, filme d’ailleurs ce dernier en vue subjective. Avec cette scène étonnante placée en ouverture, le film nous regarde littéralement dans les yeux pour nous rappeler que la mort arrive, quoi que cela nous inspire.

Krummacher ne montre pas les scènes attendues (où plutôt redoutées) d’affrontement entre mère et fille, où chaque personnage viendrait expliquer son point de vue comme autant de notes d’intention artificielles. The Death of My Mother se déroule après le verdict médical, après la décision maternelle de se suicider : il se situe dans l’attente de ce décès choisi et programmé. Attente est un mot clé. Pas de psychologie facile ici : encore vêtue de t-shirts d’adolescente, la trentenaire Julianne ne peut rien faire d’autre qu’attendre, dans un état mi-résolu mi-assommé. A l’opposé du rocambolesque charmant de Tout s’est bien passé de Ozon, The Death of My Mother est un film d’une épure sans compromis, même à l’échelle du cinéma d’auteur allemand contemporain.

On pourrait dire qu’il n’a pas l’air de se passer grand chose durant les 135 minutes du film, mais même si ces dernières s’égrainent à un rythme chuchoté, cela serait trivial et inexact. En suivant Juliane dans sa vie quotidienne, de promenades solitaires dans les bois en discussions amicales où les banalités prennent toute la place (comme ce passage sur la recette du plat préféré d’Helmut Kohl), Krummacher montre en filigrane quelque chose d’angoissant et poignant : l’impossibilité d’agir, de réagir.

Les personnages sont souvent filmés en bas du cadre de l’image, avec beaucoup d’espace au dessus de leur tête, comme si une décision ou un conseil avait une chance de leur tomber divinement dessus. Ce que la réalisatrice met en scène, c’est la solitude amère qu’il y a à se retrouver sans mode d’emploi. Par son refus des facilités, The Death of My Mother est d’une austérité souvent exigeante, mais ce tableau possède également un magnétisme certain.

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par Gregory Coutaut

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