Trois ans après le génocide contre les Tutsi, Eva, une jeune femme qui rêve de faire des études de médecine, est enlevée et soumise au guterura, un mariage traditionnel forcé. Sa famille conservatrice la pousse à accepter sa nouvelle situation, et Eva se retrouve face à un inconnu. La seule personne qui lui prodigue de la douceur est la cousine de ce dernier… La jeune mariée aura-t-elle le courage de fuir ?
The Bride
Rwanda, 2023
De Myriam U. Birara
Durée : 1h13
Sortie : –
Note :
LA BONNE ÉPOUSE
« Est-ce que ce n’est pas beau ? » commente Eva, l’héroïne, au sujet de sa propre tenue dans la première scène de The Bride. On ne sait guère alors si elle porte une robe de mariée ou de petite fille. Le danger guette : elle pourrait marcher sur une mine, « ou pire ». De fait, la brutalité s’invite rapidement dans le premier long métrage de la Congolaise Myriam U. Birara, dévoilé lors de la dernière Berlinale et sélectionné cette semaine au Festival Black Movie. Un mariage forcé l’attend, tandis qu’on évoque l’ombre d’un passé traumatique au Rwanda. On croit voir venir ce portrait de femme soumise au patriarcat, avec en toile de fond un drame historique – mais The Bride est plus inattendu que cela.
Le génocide au Rwanda est abordé de manière plutôt détournée et avec finesse. Cette subtilité caractérise tout le long métrage de Birara. La décoration des intérieurs est minimaliste, à l’image de la mise en scène. Les couleurs sont comme délavées et à vrai dire, à partir d’un récit qui pourrait être édifiant, rien n’est jamais asséné dans The Bride. On écoute le silence, ou le chant des oiseaux. Ni pittoresque ni misérabiliste, Myriam U. Birara accorde un espace précieux à son public dans ce portrait qui n’a rien de scolaire.
« Tu n’as pas l’air de quelqu’un qui a beaucoup souffert, tu ressens encore des choses, tu pleures des vraies larmes », dit-on à Eva. Il y a pourtant comme une étrange quiétude résignée dans The Bride, comme si la jeune femme se faisait à sa situation. Mais le style comme le récit ne sont, décidément, jamais comme attendus. L’objectif se décentre, le mari est quasiment toujours hors champ, visage à peine visible, tandis que prend plus de place un personnage de cousine qui devient proche d’Eva. Le point de vue glisse, il n’y a plus qu’elles deux, et le décrochage final est un nouvel élément étonnant. Sans naïveté, Eva trouve son propre chemin, comme la jeune cinéaste avec ce premier essai prometteur.
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par Nicolas Bardot