Momoko mène une vie respectable de femme au foyer. Elle s’habille élégamment et veille à ce que l’appartement soit parfait, jusque dans les moindres détails ; elle s’occupe assidûment de son mari et se donne beaucoup de mal pour lui cuisiner de la bonne nourriture. S’agit-il d’expressions d’amour ou plutôt de paranoïa ?
Rude to Love
Japon, 2024
De Yukihiro Morigaki
Durée : 1h45
Sortie : –
Note :
AU FOYER
Momoko est la femme au foyer parfaite. Ce n’est pas elle qui le dit (elle est trop modeste), ni son mari (il l’écoute à peine quand elle parle), mais l’évidence est là. Momoko s’occupe de chaque tâche ménagère avec un allant et une absence de remise en question qui en ferait presque un gentil petit robot si elle n’était pas, en plus, tout à fait adorable. Ça, ce sont ses élèves qui le disent. Momoko n’enseigne pas n’importe quoi : l’art de faire du savon. Des savons mignons et inoffensifs, mais qui glissent entre les doigts. De fait, il y a quelque chose d’insaisissable dans le quotidien de Momoko.
Visuellement, Rude to Love a de la personnalité. Les couleurs ont beau être vivaces jusqu’à la saturation (évoquant le travail d’Hong Sangsoo sur certains films récents), mais le cadre resserré, presque carré, vient enfermer Momoko dans sa maison et son jardin. Dans ce foyer où il ne manque décidément qu’un enfant, c’est d’ailleurs le hors champ qui agace l’héroïne. Il y a cette femme dont elle épie les confessions sur les réseaux sociaux, il y a ces ordures ménagères que les éboueurs ne ramassent plus, les incendies qui se déclarent dans le voisinage et même un chat presque fantôme.
Le non-dit n’est pas chose aisée à doser. Après tous ces appétissants indices, Rude to Love nous laisse au contraire mijoter, au point que lorsqu’arrive finalement le temps des révélations, notre esprit a eu suffisamment de temps pour explorer ces pistes et imaginer plusieurs dénouements possibles. Momoko a du mal à s’imposer à son entourage, et avoir à notre tour un peu d’avance sur elle est une position est peu étrange. L’actrice Noriko Eguchi (très populaire au Japon) fait néanmoins œuvre de talent pour rendre sa dignité et son mystère au personnage. Sa performance fait de Rude to Love un drame certes classique mais à l’élégance discrète et efficace.
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par Gregory Coutaut