Critique : Red Post on Escher Street

Réalisateur de génie, Tadashi Kobayashi tient une audition pour son nouveau projet de film. Plusieurs actrices répondent à l’appel ouvert, mais la plupart ne seront que des figurants. Le film peut-il être achevé sans accident ?

Red Post on Escher Street
Japon, 2020
De Sono Sion

Durée : 2h28

Sortie : –

Note :

CINÉMA, CINÉMA, TOUT LE MONDE EST FOU DE TOI

« Le cinéma change la vie » ! « Le cinéma est plus fort que la mort » ! Des phrases prononcées comme autant de devises dans le nouveau film de Sono Sion, Red Post on Escher Street. Le volume est souvent poussé au maximum dans la filmographie du cinéaste, au sens propre (dialogues hurlés, musique très présente) comme au sens figuré (les sentiments, la douleur, la colère et la passion y semblent plus intenses que partout ailleurs). Cela fait partie de l’expérience Sono Sion, ce mélange galvanisant et assommant d’un cinéma qui joue sa vie et qui donne toujours tout. C’est à nouveau le cas dans ce long métrage.

A première vue, on ne semble pourtant pas jouer sa vie dans Red Post on Escher Street. Un tournage de film est organisé et une myriade de jeunes actrices rêvent d’y jouer. Sono Sion fait le portrait des nombreuses postulantes et le ton est régulièrement à la clownerie. On galope beaucoup chez Sono Sion mais après quoi ses personnages courent-ils ? Ici, c’est souvent la nécessité vitale de courir après ses rêves. Le film est porté par un enthousiasme (un temps) insouciant. Une scène de Red Post ressemble à un concentré de Sono Sion : une actrice s’adresse à la caméra, jette les pages du scénario en l’air, nous dit nos quatre vérités tandis que d’autres actrices sont recouvertes de peinture multicolore. Le grotesque fait tout déborder, c’est un outil de comédie mais c’est aussi une manière d’être au plus près des sentiments ardents de ses protagonistes.

« Marre d’être des figurants sans visage ? » : il y a toujours une raison de se révolter dans le cinéma de Sono Sion. Ici, les stars de la figuration et les apprenties stars se côtoient. Le réalisateur leur témoigne beaucoup d’amour, mais c’est un amour qui plus largement est destiné aux marges. Si le plateau de cinéma c’est la vie, alors l’amour du cinéaste ira vers ses sans-visage, au second plan. A l’image de son amour répété pour les marginaux dans la société, et par extension les femmes. Rien à vrai dire n’est réellement inédit dans Red Post on Escher Street. Pratiquement tout le film apparaît déjà ici ou là dans sa filmographie : ce souffle particulier, ses thèmes, cette musique classique qui ressemble de plus en plus à une béquille, ce prétexte cousin de Why Don’t You Play in Hell. 2H30 est peut-être une longueur complaisante pour ce qui ressemble avant tout à une récréation, mais celle-ci, au contraire de sa récente et épuisante production Netflix The Forest of Love, parvient à être vivante, vibrante et généreuse.

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par Nicolas Bardot

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