Suze et Arthur sont fraîchement mariés et vivent dans le Lower East Side. Un jour, le couple est témoin d’un meurtre commis en face de chez eux par un gang de blousons noirs. Un événement qui va éveiller chez eux des émotions et une excitation sexuelle inattendues…
Please Baby Please
États-Unis, 2022
De Amanda Kramer
Durée : 1h35
Sortie : 31/03/2023 (sur Mubi)
Note :
LES PLAISIRS IMPOLIS
A la nuit tombée, dans la ruelle déserte et peu éclairée d’un quartier qu’on devine malfamé, un homme et une femme se dépêchent de rentrer discrètement chez eux. Le danger qui rôde ne tarde pas à pointer le bout de son nez : un gang de blousons noirs déboule en dansant, comme sorti de West Side Story. Baignés dans des néons bleus, violets et roses (soit ce qu’on appelle très sérieusement l' »éclairage bisexuel », voire Atomic Blonde ou The Neon Demon par exemple), ces marlous ont beau avoir des couteaux, ils ont également des fume-cigarettes. Le couple hétéro a raison de trembler : ce face-à-face nocturne va les plonger dans une remise en question délicieusement tordue de leurs propres désirs.
Please Baby Please se déroule quelque part dans le milieu de la contre-culture des années 50. Non pas que la date importe, car les artifices sont joyeusement visibles dans ce film tourné entre les quatre murs d’un studio. Les décors sont peu nombreux et cela donne l’impression parfois frustrante que la caméra ne va pas pouvoir aller bien loin. En revanche, les costumes nous vont droit au cœur et à la pupille. Avec son blouson noir à la doublure à imprimé panthère, le gangster d’amour a l’air d’un Marlon Brando relooké par Kenneth Anger, tandis que Demi Moore ressemble à une Cruella de cartoon. Pour notre plus grand plaisir, tous les personnages de Please Baby Please ont l’air d’être en drag, même le sage couple de protagonistes.
En effet, les vêtements chatoyants ne sont pas les seuls costumes à l’œuvre dans le film. Please Baby Please parle de ces autres costumes que sont les rôles et les normes de genre, soit l’attitude que la société attend d’un homme ou d’une femme. Avec son érotisme comique (ce saxophone !) mais subversif, la réalisatrice Amanda Kramer nous invite à profiter de la liberté gagnée à se défaire de ces costumes sociaux. Il suffit de voir le sourire de la grande Andrea Riseborough (dont on découvre ici un visage plus clownesque) au moment où celle-ci reçoit… un fer à repasser chaud sur les fesses.
C’est quand Amanda Kramer crée de telles vignettes sexy et absurdes qu’elle est le plus percutante. Please Baby Please possède aussi hélas un coté plus bavard, de longues scènes de dialogues un peu trop statiques. Ces dernières apportent néanmoins une couche queer supplémentaires en offrant un écho aux psychodrames de chambres remplis de refoulement de Tennessee Williams. Mi-Williams Mi-John Waters, mi-horny mi-prise de chou, Please Baby Please dépeint les règles hétéronormées comme un labyrinthe à la con, une bouffonnerie aux artifices voyants. C’est surtout un rêve hilarant et sensuel où chacun peut trouver le plaisir et le pouvoir.
>> Please Baby Please est disponible dès le 31 mars sur Mubi
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par Gregory Coutaut