Critique : Le Vrai du faux

Inspiré par un événement de sa vie réelle, le réalisateur raconte le projet de son long métrage ainsi : « Un jour, je découvre que j’ai un deuxième profil Facebook : un faux Armel Hostiou avec de vraies photos de moi et plein d’amies vivant toutes à Kinshasa. Il les invite aux castings de mon prochain film censé se dérouler en République démocratique du Congo. Face à l’impossibilité de clôturer ce compte, je décide de partir à la recherche de mon double. »

Le Vrai du faux
France, 2023
D’Armel Hostiou

Durée : 1h22

Sortie : 07/06/2023

Note :

DOUBLE JE

A l’origine de ce documentaire d’Armel Hostiou se trouve un fait divers : la découverte par le cinéaste français qu’à Kinshasha, quelqu’un se fait passer pour lui à l’aide d’un faux compte Facebook afin d’organiser des castings pour de mystérieux films. Hostiou décide donc de se rendre caméra à la main dans la capitale de la République du Congo pour tenter de démasquer son double. « Bienvenue au pays de la joie » lui clame-t-on dès son arrivée sur place. De fait, si le cinéaste ne tarde pas à trouver des alliés prêts à l’aider dans son enquête, ces derniers prennent l’affaire avec beaucoup plus de nonchalance que lui, et rien que ce détail lance le ton gentiment lunaire du film.

Moins qu’un reportage, Le Vrai du faux ressemble à sympathique film d’aventures ou de détective qui se bricolerait sous nos yeux au fur et à mesure. Poussé par une curiosité intellectuelle davantage que par un éventuel désir de vengeance judiciaire (l’idée de faire appel à la justice est vite écartée), Hostiou a l’humilité d’accueillir et de retransmettre à l’écran toute l’absurdité de la situation. A force de coups de théâtre et de détails délirants (dans la villa d’artistes « La vie est belle » où il réside, le chien s’appelle… Macron), il fait de son enquête un labyrinthe invraisemblable où se croisent poupées vaudoues, enregistrements secrets et entourloupes grosses comme des maisons. Et quand on croit avoir enfin trouvé le coupable, les péripéties sont en réalité loin d’être terminées.

Dans le chaos des rues de Kinshasa, trouver la réponse à la question « pourquoi une telle arnaque ? » ressemble à une mission joyeusement impossible. C’est alors une autre question qui vient progressivement prendre sa place : face à une affaire relativement inoffensive, pourquoi un tel besoin de savoir ? « Cherche d’abord le faux en toi », conseille-t-on au cinéaste. Si l’ambigüité de sa résolution pourra peut-être frustrer les amateurs de suspens, Le Vrai du faux garde sa plus grande surprise pour son dernier acte. Hostiou prend bien garde tout au long de son film à éviter de poser sur cette histoire un regard « exotisant » de personne occidentale, mais c’est une dernière partie à la mélancolie inattendue qui vient finalement soulever les questions les plus intéressantes sur la complexité des rapports post-coloniaux.

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par Gregory Coutaut

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