A voir en ligne | Critique : Le Photographe

Raphi, modeste photographe, fait la rencontre d’une muse improbable, Miloni, jeune femme issue de la classe moyenne de Bombay. Quand la grand-mère du garçon débarque, en pressant son petit-fils de se marier, Miloni accepte de se faire passer pour la petite amie de Rafi. Peu à peu, ce qui n’était jusque-là qu’un jeu se confond avec la réalité…

Le Photographe
Inde, 2019
De Ritesh Batra

Durée : 1h50

Sortie : 22/01/2020

Note :

JUSTE UNE PHOTO DE TOI

Six ans après avoir fait sensation à Cannes avec son premier long métrage The Lunchbox, et après quelques projets anglophones, le cinéaste indien Ritesh Batra revient dans sa ville natale de Mumbai avec Le Photographe. De Mumbai nous voyons d’abord le monument le plus connu et touristique : la Porte de l’Inde. Aux pieds de ce monument historique où la ville se jette dans l’Océan Indien, de très nombreux photographes proposent leurs services aux touristes comme aux locaux. Cette arche est l’éternel point de départ de plus d’un voyage en Inde, et c’est le point de départ d’un film romantique qu’on croirait pouvoir deviner à l’avance – à tort.

Le Photographe n’appartient pas du tout à la gigantesque et euphorisante famille des blockbusters sentimentaux du sous-continent indien. Les ingrédients de la comédie romantique sont bien présents dès le départ (les quiproquos, l’humour, le hasard), mais sans chanson ni musique, le ton est ici au réalisme sobre avant tout. Il y a même une étonnante et entêtante place laissée au silence dans cette curieuse romance. Aux silences au pluriel, car on a rarement vu deux protagonistes de romcom aussi peu s’épancher, garder autant pour eux leurs élans intérieurs. Ces derniers se font attendre, attendre… et s’ils ne venaient finalement pas du tout ?

Il y a une singulière distance à l’œuvre ici, une amertume chuchotée qui prend son temps. Comme dans le superbe The Souvenir de Joanna Hogg, la romance contrariée est annoncée dès le titre qui s’attache moins aux personnages qu’à un objet, un symbole presque trivial. Le titre anglais d’origine – Photograph – ne désigne en effet non pas le photographe mais la photo en elle-même. De fait, les protagonistes du film sont comme en retrait de leurs propres vies, prisonniers presque résignés des pressions et conventions sociales. En filmant finalement davantage l’organisation arachnéenne de la société indienne que les étapes attendues du coup de foudre, Ritesh Batra pioche l’émotion là où on ne l’attendait pas (ou plus?). Autant qu’une histoire d’amour, Le Photographe est une histoire de solitudes.


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par Gregory Coutaut

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