
Fatima, 17 ans, est la petite dernière. Elle vit en banlieue avec ses sœurs, dans une famille joyeuse et aimante. Bonne élève, elle intègre une fac de philosophie à Paris et découvre un tout nouveau monde. Alors que débute sa vie de jeune femme, elle s’émancipe de sa famille et ses traditions. Fatima se met alors à questionner son identité. Comment concilier sa foi avec ses désirs naissants ?

La Petite dernière
France, 2025
De Hafsia Herzi
Durée : 1h46
Sortie : 22/10/2025
Note :
FEMME AIMÉE ET FEMME QUI AIME
Pas facile d’adapter La Petite dernière, l’excellent récit de l’autrice Fatima Daas. Comment retranscrire l’énergie particulière de ce monologue intérieur tout en répétition, scandé comme une prière ? La cinéaste Hafsia Herzi s’en tire avec talent en prenant pourtant… le chemin inverse. Herzi assume en effet d’adapter avant tout les faits évoqués par Daas plutôt que la forme de son livre. Le cheminement intérieur de l’héroïne suit donc ici un déroulé chronologique classique et accessible, de l’adolescence à l’âge adulte, de la honte de sa propre homosexualité à l’acceptation. A première vue, cela pourrait donner l’impression décevante que le film d’Herzi manque d’ambition et ne se distingue pas suffisamment des 1001 récits de coming out queer qui existent déjà. Or la subtilité de La Petite dernière se trouve entre ses lignes.
Il faut déjà reconnaître à Herzi le petit tour de force consistant à nous montrer ici des personnages que l’on ne croise quasiment jamais dans le cinéma français, même au rayon queer : une musulmane lesbienne, et autour d’elle une ribambelle de jeunes femmes queer racisées. Bien dans leur tête ou non, assumées ou non, peu importe. Herzi ne se contente pas de braquer enfin un projet sur ces personnes rarement représentées avec justesse (ou même rarement représentées tout court) : elle fait des toutes ces filles des personnages plus nuancés, crédibles et vivants qu’ailleurs. Remarquable directrice d’actrice, Herzi obtient des merveilles de son casting. Face à Nadia Melliti, couronnée du prix d’interprétation féminine à Cannes pour ce rôle, citons particulièrement Park Ji-Min. Déjà hallucinante dans Retour à Séoul, l’actrice (qui avait pas moins de trois films à Cannes cette année) vole avec maestria chacune des scènes dans laquelle elle apparaît.
C’est à travers l’enchaînement des rencontres avec de tels personnages secondaires que l’héroïne approfondit sa connaissance d’elle-même et gagne en confiance, et c’est avec cette structure quasi épisodique qu’Herzi parvient finalement à restituer la plongée introspective du texte d’origine. La Petite dernière n’a certes pas la singularité formelle de l’œuvre de Daas, mais possède un charme attachant et surtout sait preuve de personnalité.
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par Gregory Coutaut