A voir en ligne | Critique : Give Me Liberty

Vic, malchanceux jeune Américain d’origine russe, conduit un minibus pour personnes handicapées à Milwaukee. Alors que des manifestations éclatent dans la ville, il est déjà très en retard et sur le point d’être licencié. A contrecœur, il accepte cependant de conduire son grand-père sénile et ses vieux amis Russes à des funérailles. En chemin, Vic s’arrête dans un quartier afro-américain pour récupérer Tracy, une femme atteinte de la maladie de Lou Gehrig. C’est alors que la journée de Vic devient joyeusement incontrôlable…

Give Me Liberty
États-Unis, 2019
De Kirill Mikhanovsky

Durée : 1h51

Sortie : 24/07/2019

Note :

BOUGE LE BUS

On entend dans Give Me Liberty quelques paroles du Star-Spangled Banner – on y chante du land of the free, on y tartine du home of the brave, ce qui évidemment ne manque pas de piment dans le film de Kirill Mikhanovsky. Les protagonistes se souviennent-ils de ces paroles ? Ne ressemblent-elles pas à un vieux mirage absurde ? Car dans l’Amérique filmée par Mikhanovsky, plus rien ne semble fonctionner. La tête ne marche plus, les jambes ne marchent plus, le fauteuil roulant supposé pallier les jambes (qui ne marchent plus) ne marche plus non plus et c’est même le système entier qui paraît totalement enrayé.

Le jeune héros conduit une lourde carlingue pourrave censée amener des vieillards et des handicapés dans divers lieux qui semblent à peu près tous impossibles à atteindre. Tout cela pourrait constituer un kouglof tragique d’une noirceur totale mais Mikhanovsky choisit plutôt la comédie. Vic transporte des vieux pleurnichards, des gens qui lui braillent dessus, et la surchauffe fait fonctionner à merveille cet hilarant malaise. Le montage parfois épileptique traduit l’urgence grotesque de cet incendie de poulailler – les poules volent et caquettent dans tous les sens et l’on ne distingue plus rien à travers la fumée.

Give Me Liberty est l’antidote idéal à tous ces films indés et crémeux où des antagonistes grognons ont finalement tant-à-partager : l’incapacité à s’entendre est totale dans le film de Mikhanovsky et c’est ainsi que tous doivent vivre ensemble. Dans le tumulte, les esclandres, le pathétique et au final dans une certaine tendresse, précisément parce que le cinéaste ne réduit pas ses personnages à des poupées obéissant à un scénario binaire. La violence est drolatique dans Give Me Liberty, la tristesse est humaine, l’espoir est voilé, la pulsion de vie, au bout du compte, irrésistible. Voilà une vraie petite merveille.


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par Nicolas Bardot

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