Festival Cinéma du Réel | Critique : Everything Will Be OK

Imaginez que les animaux prennent le pouvoir. Se comporteraient-ils comme les humains ? Feraient-ils les mêmes erreurs, se battraient-ils pour le pouvoir, gouverneraient-ils par la terreur, dévoreraient-ils tout ? Que représenteraient leurs œuvres d’art ? La planète serait-elle plus en paix ?

Everything Will Be OK
France/Cambodge, 2022
De Rithy Panh

Durée : 1h38

Sortie : –

Note :

LA MÉLODIE DU MALHEUR

De par son parti pris de mise en scène, le nouveau documentaire de Rithy Panh évoque deux de ses récentes réussites. L’utilisation de figurines d’argile immobiles, composant des tableaux à la fois expressifs et figés telles des terribles crèches, est un procédé que le cinéaste avait déjà utilisé avec succès dans ce qui demeure peut-être son tout meilleur film : L’Image manquante. Ici aussi les dioramas sont infernaux, illustrant des scènes d’oppression à grande échelle. La seule différence est que les scènes de Everything Will Be Ok sont imaginaires, illustrant un potentiel futur. Libérées du devoir de fidélité des reconstitutions, ces visions là sont plus amples, plus folles, prêtes à recouvrir plusieurs époques à travers un poème épique et technologique évoquant Irradiés (également présenté en compétition à Berlin, il y a deux ans).

Il avait été reproché à Irradiés un manque de subtilité au moment de créer des parallèles entre les différentes formes d’oppression du XXe siècle. Ce reproche nous parait aujourd’hui plutôt aller comme un gant à Everything Will Be Ok. Si les visions d’argile de Rithy Panh sont pleines d’un séduisant mystère à force de mélanges contre nature (le règne animal, une technologie rétrofuturiste, des écrans dans l’écran), on ne peut pas en dire autant de l’interminable litanie des cataclysme égrenée par la voix off. Dans un espèce de fourre-z’y-tout sentencieux, sans nuances ni respirations, le cinéaste sort l’emporte-pièce pour sauter d’Hitler au Covid, sans oublier de s’arrêter régulièrement sur la case « aphorismes relous ». Fable absconse, Everything Will Be Ok possède néanmoins l’une des toutes meilleures scènes d’ouverture vues ces derniers temps. L’espace d’un instant, les spectres du passé s’invitent à nos cotés dans des fauteuils de spectateurs tournés vers le futur : renversant.

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par Gregory Coutaut

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