Berlinale | Critique : El Mensaje

Le don d’une jeune fille pour communiquer avec les animaux donne à ses tuteurs l’idée de lui proposer des consultations en tant que médium animalier afin de gagner leur vie. 

El Mensaje
Argentine, 2025
De Iván Fund

Durée : 1h31

Sortie : –

Note :

MESSAGE PERSONNEL

« Snoopy se trouve dans un lieu très paisible » : Myriam emploie un ton très digne pour rassurer son interlocutrice – même s’il s’agit de commenter la place occupée par un animal de compagnie (Snoopy !) au paradis. Anika, la petite-fille de Myriam, a le pouvoir de communiquer avec les animaux (notamment disparus) et c’est ainsi que les protagonistes d’El Mensaje, présenté en première mondiale dans la compétition de la Berlinale, gagnent leur vie. Anika est-elle trimballée par des charlatans ? Est-elle l’équivalent médium d’une mini-miss ou d’une patineuse exploitées ? Est-elle montrée comme s’il s’agissait d’un cirque ambulant ?

El Mensaje ne choisit aucune de ces possibilités sensationnalistes. Anika a-t-elle vraiment un don ou est-elle chaperonnée par des marchands de tapis ? De manière assez surprenante, cette question prend de moins en moins d’importance au fil du film. Cette hésitation qui devient secondaire rappelle la dynamique déjà à l’œuvre dans le précédent long métrage de l’Argentin Ivan Fund, Piedra Noche. Dans ce dernier, le réalisme était balayé par un vent fantastique. C’était également un film sur la foi, et ce que celle-ci permet. Au sujet d’El Mensaje, Fund commente : « c’est un portrait réaliste d’un monde fantastique. A moins que ça ne soit l’inverse ».

Qu’est-ce que cette hésitation produit dans El Mensaje ? Tout d’abord, l’économie d’explications nourrit le mystère. Et plus encore : l’absence d’explication rend ce qu’on voit à la fois sérieux et absurde. Voilà qui enrichit les tonalités de ce portrait familial en apparence cassé… mais le film n’emploie pas non plus vraiment la route mélodramatique. A mesure que les protagonistes sillonnent les chemins, la mélancolie semble s’amplifier, mais on ne rencontre pas vraiment d’embûches, l’écriture est dépourvue d’événements dramatiques. Ce minimalisme en plein no man’s land s’avère de plus en plus expressif et émouvant : El Mensaje devient un film bizarrement doux, lové dans le silence et les sons étouffés de la nature. Le pouvoir d’Anika devient contagieux : on finit par ressentir et peut-être même entendre ce qui, parmi les animaux ou parmi les humains, reste indicible.

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par Nicolas Bardot

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