Festival de Karlovy Vary | Critique : A Thousand and One

Dans les années 90 à New York, Inez décide de kidnapper son fils après que celui-ci lui ait été enlevé par les services sociaux.

A Thousand and One
Etats-Unis, 2023
De A.V. Rockwell

Durée : 1h57

Sortie : –

Note :

LA TÊTE HAUTE

Inez a beau venir d’un des coins les moins reluisants de New York, elle n’est pas du genre à accepter de se laisser faire par l’adversité. A l’image des fiers buildings de Manhattan à qui sont consacrées les premières images du générique (plutôt qu’aux rues de Harlem où va justement se passer le reste du film), cette jeune femme n’a pas peur de prendre la place qui lui ait due. A peine sortie de prison, la voilà déjà en train de reprendre son activité de coiffeuse, quitte à aller chercher les clients par la peau du coup dans leur voiture.

Il y a une énergie contagieuse qui se dégage de ces premières scènes. Celle-ci vient à la fois du bagout de l’autrice-compositrice-interprète Teyana Taylor dans le rôle principal, et du rythme soutenu imposé par la mise en scène de la réalisatrice A.V. Rockwell, qui signe ici son premier long métrage. A Thousand and One possède alors le même allant que son héroïne bien décidée à contourner les obstacles, quitte à aller « reprendre » illégalement son fils aux services sociaux. Cette décision dramatique aurait pu donner lieu à une course contre la montre, mais c’est un autre récit qui nous attend.

Contre toute attente, l’enlèvement en question fonctionne et les années passent à coup d’ellipses sans que la police ne viennent retrouver la trace d’Inez et son fils devenu adolescent. Leur secret se fait néanmoins de plus en plus pesant à mesure que fiston désire prendre son indépendance et retrouver son identité. Etalé sur plusieurs années, A Thousand and One est un récit ambitieux qui s’embourbe hélas dans son changement progressif de registre, remplaçant sons peps par une grisaille souvent répétitive. C’est comme si le film perdait de sa personnalité au fur et à mesure.

Si A.V. Rockwell peine à maintenir sur la longueur la tension de cette intimité familiale brisée, elle parvient à toucher du doigt un sujet d’une autre échelle. En intercalant çà et là des extraits de journaux télévisés d’époque et des discours des maires conservateurs Giuliani et Bloomberg (soit le même procédé narratif que dans le beau documentaire The Stroll, également primé à Sundance), elle fait d’A Thousand and One le portrait à la fois touchant et amer de la ville de New York où la gentrification vient contrecarrer les efforts des marginaux pour y survivre la tête haute.

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par Gregory Coutaut

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