TIFF 2022 | Critique : 1970

1970. Les travailleur.euse.s en grève manifestent en Pologne communiste pour s’opposer à l’augmentation des prix. Dans les bureaux des dignitaires, la tension et la violente répression croissent à mesure que la révolte s’intensifie.

1970
Pologne, 2021
De Tomasz Wolski

Durée : 1h10

Sortie : –

Note :

POUPÉES TUEUSES

Dans son documentaire 1970, Tomasz Wolski retrace la grève en Pologne de travailleuses et travailleurs (ainsi que les émeutes et la répression qui ont suivi) après une augmentation du prix de denrées alimentaires. C’est un combat et un récit de survie qui sont racontés à la fois avec des outils documentaires traditionnels (des images d’archives, des enregistrements audio) mais aussi par une recréation. Si les grévistes sont filmé.e.s, les autorités communistes sont, elles, représentées par des marionnettes en stop-motion. 1970 pallie ainsi les images manquantes qui se mêlent aux images archivées.

Ces reconstitutions gardent un pied dans le documentaire puisqu’une partie des échanges verbaux des autorités a été enregistrée – et diffusée dans le film. Tandis que dans la rue des gens se battent pour se nourrir, Wolski filme ses protagonistes dans l’ombre, raides et plongés dans la patine 70s de leurs bureaux à l’atmosphère épaisse, baignés par un brouillard de cigarettes. Ce n’est pas un spectacle de Guignol, mais il y a inévitablement dans ces marionnettes et dans leurs traits figés une dimension absolument monstrueuse.

De fait, le long métrage raconte comment le pouvoir s’exprime – monstrueusement – face à la gronde du peuple ; à l’époque en Pologne, aujourd’hui partout. Cet épisode a fait plus d’un millier de blessé.e.s, une quarantaine de victimes, dont des enfants. Le dispositif de 1970 peut être un peu raide, et il n’est guère aisé de maintenir une tension à travers de nombreuses conversations téléphoniques. Mais le film parvient à proposer une stimulante réflexion sur l’Histoire, sa mémoire et sa mise en scène, lorsqu’aux marionnettes succèdent les visages glaçants des véritables tortionnaires.

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par Nicolas Bardot

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