Berlinale 2025 : notre bilan

La 75e édition de la Berlinale s’est achevée ce dimanche et le festival était à suivre comme chaque année sur Le Polyester (retrouvez notre couverture composée de près de 80 articles). Nous avons vu l’intégralité de la compétition internationale, de la nouvelle compétition Perspectives (dédiée aux premiers films) ainsi que de la compétition courts métrages – sans compter les découvertes que nous avons faites dans les autres sections du festival. Voici les temps forts et les tendances de cette année.

Cette Berlinale 2025 était une année de renouvellement avec l’arrivée de l’Américaine Tricia Tuttle à la direction artistique, succédant à l’Italien Carlo Chatrian après 5 éditions remarquables. Précédemment directrice du Festival de Londres, Tricia Tuttle et son équipe ont composé une sélection qui nous a semblé plus mainstream que celle de l’équipe de Chatrian – sans qu’il ne s’agisse d’un gros mot. Elle a également su trouver un bon équilibre grâce à l’éclectisme de son cinéma d’auteur plutôt grand public, comme l’illustre le trio de tête au palmarès : le récit d’apprentissage norvégien Dreams (Sex Love), la dystopie brésilienne The Blue Trail et le road movie argentin en noir et blanc El Mensaje. Les propositions les plus radicales, moins importantes en nombre, étaient aussi à nos yeux les plus éclatantes : le feu d’artifice Reflet dans un diamant mort, le majestueux La Tour de glace, le mal élevé Kontinental’25 et l’excellent nouveau Hong Sangsoo, What Does That Nature Say to You.

Remarque peut-être étonnante alors qu’on vient d’évoquer Hong Sangsoo, grand habitué de la Berlinale : la sélection officielle s’est également distinguée par un renouvellement des cinéastes sélectionné.es. Beaucoup de noms encore méconnus ou pas spécifiquement reliés à la Berlinale ont en effet fait ici leur première apparition dans la compétition d’un festival de catégorie A. C’était le cas par exemple du duo belge Hélène Cattet & Bruno Forzani dont le cinéma, dans des festivals plus conservateurs, a davantage de chances d’être confiné à vie en séance spéciale ou en séance de minuit. Leur flamboyant Reflet dans un diamant mort était à la place qu’il méritait : en compétition d’un des plus grands festivals du monde. Même sentiment pour la Française Lucile Hadzihalilovic, qui a dû attendre ce stade de sa carrière pour être enfin à l’honneur en compétition d’un des big 3 (Berlin, Cannes, Venise). Cela a eu lieu à Berlin, en 2025, ce qui ne manque pas de sel quand on constate chaque année le nombre gargantuesque de films français sélectionnés à Cannes – et qui pour un certain nombre font preuve d’une ambition bien plus modeste.

A ce sujet : l’un des paris culottés de cette édition fut… le peu de place accordée au cinéma allemand en compétition. Un seul cinéaste allemand à signaler (qui plus est un inconnu : Frédéric Hambalek et sa comédie What Marielle Knows), auquel on peut ajouter la production allemande Yunan dirigée par l’Ukrainien Ameer Fakher Eldin désormais basé en Allemagne. Même si, de Christian Petzold à Angela Schanelec, il y a eu des films forts venus d’Allemagne ces dernières années à la Berlinale, on peut aussi trouver rafraichissant que des festivals internationaux le soient vraiment et ne réservent pas nécessairement 4 ou 5 places en compétition à la production nationale.

L’une des grandes nouveautés de l’édition 2025 a été la création de la compétition Perspectives. Celle-ci prend le relai d’Encounters, section créée par l’équipe de Chatrian et dédiée à des films à la mise en scène et l’écriture innovantes (et qui était à nos yeux un vivier des meilleures découvertes de l’année à chaque édition). Spécifiquement dédiée aux premiers films, Perspectives s’en est bien sortie avec beaucoup de franches réussites : le Français Le Rendez-vous de l’été, les Américains BLKNWS : Terms & Conditions et Mad Bills to Pay, l’Indien Shadowbox, le Philippin Where the Night Stands Still, le Slovène Little Trouble Girls, et pour nous le sommet de cette compétition, le Belge On vous croit, film de procès d’une puissance impressionnante.

L’une des grandes réussites de ce cru fut sa compétition courts métrages. C’est généralement l’un des temps forts de la Berlinale – ce fut encore plus le cas cette année. Là encore, la compétition a fait preuve d’un éclectisme grisant, de l’animation au documentaire, de l’expérimental aux formes plus familières, de Singapour au Mexique en passant par l’Iran et Cuba. Découvrez notre dossier consacré aux courts métrages qui nous ont le plus marqués lors de cette édition.

Retrouvez ci-dessous notre couverture intégrale de cette édition, avec toutes nos critiques des sections compétitives ainsi que nos critiques des films qui nous ont enthousiasmés dans les sections non-compétitives.

ENTRETIENS

• « En utilisant le genre de la comédie musicale, j’ai voulu apporter un peu d’humour et d’espièglerie à cette histoire assez existentielle et mélancolique » : Julie Černá (Stone of Destiny)
• « Réaliser que notre histoire était composée de perspectives si diverses est devenu l’épine dorsale de « Casa chica« » : Lau Charles (Casa chica)
• « J’ai rencontré Koki, le perroquet de Tito, et j’ai immédiatement su que j’avais mon narrateur » : Quenton Miller (Koki, Ciao !)
• « Je souhaite faire de l’animation pour confirmer la sensation et l’existence de la peau » : Yoriko Mizushiri (Ordinary Life)
• « Chaque désir, chaque secret, chaque pensée intérieure que vous avez, vous pouvez les exprimer visuellement avec votre personnage » : Naomi Noir (Mother’s Child)
• « Je me reconnais dans cette manière de protéger sa propre sensibilité dans un monde hostile » : Lucía G. Romero (Casi septiembre)
• « L’aspect des personnages a participé à cet univers creepy-cute propre à l’enfance, qui s’enracine dans la réalité en flirtant avec la magie et l’imaginaire » : Sylwia Szkiladz (Autokar)
• « D’un point de vue créatif, le film a toujours été consacré à un espace liminal, un purgatoire où les humains et les esprits coexistent » : Nelson Yeo (Through Your Eyes)
• « J’ai trouvé beaucoup de bonheur et de beauté dans le kitsch, le banal et le girly » : Giselle Lin (Children’s Day)

CRITIQUES

Compétition internationale

Ari, Léonor Serraille
Blue Moon, Richard Linklater
La Cache, Lionel Baier
Dreams, Michel Franco
Dreams (Sex Love), Dag Johan Haugerud
What Does That Nature Say to You, Hong Sangsoo
Hot Milk, Rebecca Lenkiewicz
If I Had Legs, I’d Kick You, Mary Bronstein
Kontinental’25, Radu Jude
El Mensaje, Ivan Fund
Mother’s Baby, Johanna Moder
Reflet dans un diamant mort, Hélène Cattet & Bruno Forzani
Living the Land, Huo Meng
Timestamp, Kateryna Gornostai
La Tour de glace, Lucile Hadzihalilovic
The Blue Trail, Gabriel Mascaro
What Marielle Knows, Frédéric Hambalek
Girls on Wire, Vivian Qu
Yunan, Ameer Fakher Eldin