Critique : Flow

Un chat se réveille dans un univers envahi par l’eau où toute vie humaine semble avoir disparu. Il trouve refuge sur un bateau avec un groupe d’autres animaux. Mais s’entendre avec eux s’avère un défi encore plus grand que de surmonter sa peur de l’eau ! Tous devront désormais apprendre à dépasser leurs différences et à s’adapter au nouveau monde qui s’offre à eux…

Flow
Lettonie, 2024
De Gints Zilbalodis

Durée : 1h25

Sortie : 30/10/2024

Note :

AU FIL DE L’EAU

Le Letton Gints Zilbalodis (lire notre entretien) a été très remarqué avec son premier long métrage, Ailleurs, qui constituait un sacré tour de force : le jeune cinéaste a en effet réalisé ce film d’animation entièrement seul, de A à Z. Ailleurs racontait le périple d’un jeune garçon, sur une île, essayant d’échapper à la grande forme menaçante qui est à ses trousses. Soit une histoire assez voisine de celle de son nouveau film, Flow, dans laquelle un chat solitaire est contraint de fuir pour survivre lorsque l’endroit paisible où il habite se retrouve dramatiquement inondé.

On retrouve dans Flow une approche voisine d’Ailleurs, empruntant à la cinématique de jeu vidéo : à la fois par son graphisme, et le fait que le récit suit moins une logique narrative que celle de l’exploration d’un monde. Outre le jeu vidéo, l’autre influence se situe sans surprise chez un cinéaste que Zilbalodis cite comme modèle : Hayao Miyazaki. Flow évoque autant Ponyo sur la falaise et ses mondes engloutis que Totoro ou Chihiro où des héroïnes livrées à elles-mêmes arrivent dans un monde inconnu qui émerveille comme il effraie.

Le héros de Flow est donc un chat, inspiré du propre chat du cinéaste, et dont le design est très proche de ceux qu’on pouvait croiser dans Ailleurs – les rapprochements entre les deux films suggèrent presque un shared universe. Ce chat apporte une irrésistible mignonnerie à Flow et il y a fort à parier que le long métrage n’aurait pas suscité le même attachement avec un varan ou une autruche dans le rôle principal. Mais les qualités cinématographiques du film vont au-delà de son adorable protagoniste. Le fait que Flow présente un monde sans homme fournit beaucoup de liberté imaginative. Hormis quelques exceptions, le film se retient sur l’antropomorphisme et n’a donc pas recours aux dialogues (on n’entendra qu’une ribambelle de miaou différents). Zilbalodis confirme ainsi son aisance à articuler une narration par l’efficacité concise de son écriture et l’inspiration de sa mise en scène.

L’image de Flow est très mobile, qu’il s’agit de scènes contemplatives ou de scènes d’action. Le réalisateur effectue un travail remarquable sur des échelles gigantesques, à la fois visuellement et temporellement : s’agit-il là des restes d’une civilisation ancienne ? Est-ce le monde contemporain ? Ou bien un futur lointain ? Cette hésitation est un autre voyage dans ce long métrage qui sait mettre en scène des découvertes merveilleuses. Gints Zilbalodis se passe avec talent d’antagonismes à proprement parler – ici les personnages font avant tout face aux épreuves imposées par la nature. Ce conte philosophique, qui a davantage de ressources que son précédent film, revêt une dimension écologique, mais aussi humaine avec ces protagonistes très différents qui doivent apprendre à vivre ensemble. Sous des apparences minimalistes, Flow déploie une ambition poétique renversante.

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par Nicolas Bardot

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