Critique : Girls Will Be Girls

Mira, 16 ans, mène une vie d’élève modèle dans un pensionnat d’élite au nord de l’Inde. Alors que les examens approchent, sa mère Anila revient s’installer dans la région pour la soutenir et veiller sur elle. Mais la rencontre de Mira avec un nouvel élève, Sri, va semer le trouble dans la relation entre les deux femmes, chacune se retrouvant confrontée à ses propres désirs.

Girls Will Be Girls
Inde, 2024
De Shuchi Talati

Durée : 1h59

Sortie : 21/08/2024

Note :

AH VOUS DIRAIS-JE MAMAN

2024 est-elle d’ores et déjà l’année du cinéma indien ? En parallèle des films d’animations primés à Rotterdam (Kiss Wagon et Schirkoa: In Lies We Trust) des auteurs remarqués à Berlin (The Adamant Girl, In the Belly of a Tiger, The Fable), et bien sûr du grand retour du pays en compétition à Cannes après presque quatre décennies d’absence injuste (avec le formidable All We Imagine as Light), il y a un autre film qui continue de tirer son épingle du jeu. Premier long métrage de la cinéaste Shuchi Talati, Girls Will Be Girls a été primé dès sa première à Sundance avant d’entamer un sacré circuit en festivals, allant jusqu’à remporter les plus hautes distinctions aux festivals de Biarritz et Cluj-Napoca en un même weekend.

Mira, 16 ans, est déléguée de classe dans un lycée plutôt strict. Sa coupe carrée sage retenue par une barrette lui donne des airs enfantins, mais elle n’est pas née de la dernière pluie. Quand un nouvel élève venu de l’étranger vient la draguer en l’invitant à regarder les étoiles dans son télescope (faut-il y voir un symbole?), elle garde les pieds sur terre, en tout cas pour un temps. Puis, quand les sentiments menacent de devenir plus importants que les bonnes notes, sa mère est là pour la rappeler gentiment à l’ordre. Girls Will Be Girls est une romance adolescente qui ne manque pas de douceur (ce que vient d’ailleurs souligner le chaleureux travail sur les couleurs par la cheffe opératrice taiwanaise Jih-E Peng) et qui n’a pas peur d’évoquer la sexualité féminine sans trop de complexe. Ni conte de fées candide ni drame au réalisme brutal, le film évolue dans un entre deux agréable… quitte à stagner un peu trop et à risquer un certain surplace.

A force de remettre son dénouement à plus tard (la question centrale étant « Mira va-t-elle réussir à voir le loup comme elle en crève visiblement d’envie ? »), on se demande un peu quel regard la cinéaste pose exactement sur la situation de son héroïne soumise à bien des frustrations. En effet, il y a un potentiel particulièrement cruel et donc hautement comique dans ce portrait de godiche coincée qui rêve de tripoter un zizi, et dans la concurrence tordue qui se noue avec sa mère un peu trop accueillante avec le fiancé de Mira. Explorer ces pistes aurait sans doute abouti a un résultat bien plus clivant, mais il est difficile d’ignorer les nombreux gags méchants qui ne demanderaient qu’un léger coup de pouce pour percer à la surface.

Le côté finalement plutôt lisse de Girls Will Be Girls explique peut-être en partie sa popularité, mais peut aussi s’avérer une frustration. Le récit est plein de codes culturels dépaysants (hiérarchies scolaires, éducation sexuelle), mais les codes cinématographiques utilisés restent un peu trop familiers et convenus pour que ce joli petit voyage laisse une impression très durable. De l’interprétation à la mise en image, il y a néanmoins suffisamment de savoir-faire à l’écran pour retenir l’attention et rendre curieux de la suite de la carrière de la réalisatrice.

| Suivez Le Polyester sur Twitter, Facebook et Instagram ! |

par Gregory Coutaut

Partagez cet article