Carrefour du Cinéma d’Animation | Critique : The Missing

Eric, artiste d’animation au caractère effacé, vit avec sa mère. Il a le béguin pour son gentil collègue Carlo, une affection qu’il n’ose pas exprimer. Eric ne peut pas parler, et interagit avec les autres à l’aide d’un tableau blanc. Le jeune homme est confronté à des souvenirs d’enfance refoulés, peuplés d’extraterrestres.

The Missing
Philippines, 2023
De Carl Joseph Papa

Durée : 1h30

Sortie : –

Note :

NOIR COMME LE SOUVENIR

Réalisé par le Philippin Carl Joseph Papa, The Missing est un long métrage dont l’animation est réalisée par rotoscopie. Le film a donc d’abord été tourné en prises de vue réelles avec des comédiennes et comédiens, dont la brillante Dolly De Leon, remarquée chez Lav Diaz, Erik Matti ou récemment dans Sans filtre de Ruben Östlund. Le résultat est, naturellement, réaliste… mais le réalisme ne semble pas être une fin en soi dans The Missing. Si la rotoscopie permet de conserver l’expressivité du casting, Papa laisse très vite une place au surréel. La bouche d’Eric, le personnage principal, est effacée. En une rupture (ou un rêve ?), le film bascule vers la science-fiction. Le cinéaste établit un intéressant dialogue entre l’apparence ultra-réaliste et la tension fantastique dans The Missing.

Voilà déjà qui distingue le long métrage : la rotoscopie a, en général, été davantage utilisée dans des documentaires ou des films très réalistes que dans des purs récits fantastiques. L’animation dans The Missing est libre, inventive et particulièrement expressive : parties du visage effacées, quadrillages apparents, style crayonné barré… chaque élément semble être choisi en lien direct avec l’expression des émotions et du monde intérieur. Le genre est aussi un moyen d’expression, avec ici le fantastique pour parler du trauma queer, à l’image de Mysterious Skin de Gregg Araki dont on ressent ici l’ombre pulp, adolescente et subversive.

A partir d’une technique qui peut avoir aussi une certaine froideur, Carl Joseph Papa signe un film chaleureux, habité par une émouvante tendresse queer. Très remarqué lors de sa première mondiale aux Philippines l’été dernier, The Missing est montré en première européenne au Festival de Rotterdam. On reconnaît là la patte du festival qui a le chic pour nous montrer des projets hors normes comme on n’en voit pas assez ailleurs.

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par Nicolas Bardot

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