Festival de Cannes | Critique : In Flames

Après la mort d’un chef de famille respecté à Karachi, une veuve et sa fille étudiante, Mariam, sont frontalement exposées aux violences et abus d’un patriarcat délétère, qui ne les a déjà pas épargnées par le passé.

In Flames
Pakistan, 2023
De Zarrar Kahn

Durée : 1h38

Sortie : prochainement

Note :

FEMMES EN CAGE

Etudiante en médecine, Mariam à la tête sur les épaules. Elle vient de perdre son père mais la vie continue et la voici en train de conduire sa propre voiture vers l’université, autant dire vers son destin et son indépendance. C’est à ce moment-là, alors qu’elle s’arrête innocemment à un feu rouge, que la violence surgit brutalement par la vitre de sa portière : un homme s’accroche à elle et tente de rentrer dans l’habitacle. L’épisode est bref, Mariam parvient à semer l’enragé et s’en sort indemne. Du moins en apparence.

Mariam comprend surtout, presque par reflexe, que son intérêt est de ne pas faire trop de vagues. La jeune femme a beau vivre à Karachi, l’une des villes les plus grandes et plus modernes du Pakistan, elle vit avant tout dans une société où la violence envers les femmes peut prendre plus d’un visage, qu’il s’agisse d’une agression publique en plein jour ou de la la pernicieuse générosité de son oncle. « On n’est pas à Bollywood ici » lui crie-t-on, comme si elle avait besoin d’une telle piqûre de rappel. Mariam vit dans une société machiste où même les hommes civilisés ont l’air fous furieux et où les femmes ont toutes les raisons de perdre la raison. Elle est en cage rien que lorsqu’elle regarde par la fenêtre. Comme l’indique le titre, elle est déjà dans les femmes de l’enfer – le patriarcat, c’est déjà un film d’horreur en soi.

Plus qu’un pur film d’horreur, la première partie d’In Flames évoque un drame hybride à l’atmosphère d’abord intranquille (épousant la méfiance de Mariam lorsque, à sa grande surprise, elle fait la connaissance d’un gentil garçon) puis de plus en plus étrange et tendue. Ce n’est que progressivement que se dépose le voile fantastique qui vient souligner l’angoisse de la protagoniste. Celui-ci débute presque par un malentendu (Mariam a-t-elle réellement reconnu son agresseur dans la rue ?), mais s’impose de plus en plus jusqu’à culminer dans une autre forme de rage. Ce n’est sûrement pas un hasard si le cinéaste Zarrar Kahn, dont c’est le premier long métrage, ouvre son film sur un plan du drapeau pakistanais. Pas de hasard non plus à ce que le dénouement prenne la forme métaphorique d’un bucher cathartique et féroce, un feu dans lequel jeter les misogynes de tous poils.

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par Gregory Coutaut

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