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Vous avez demandé un ovni ? C’est Koki le cacatoès qui va vous répondre. Dans Koki, Ciao, Quenton Miller donne la parole au perroquet de Tito et retrace, à partir de photographies, une Histoire composée de dictateurs variés. Pendant ce temps, le volubile oiseau traverse le temps, nous fait part de ses pensées, mais insulte aussi vos mères. Quenton Miller nous en dit davantage sur cette drôle d’étrangeté surréelle – et bien réelle.
Quel a été le point de départ de Koki, Ciao ?
Le film est une autobiographie de Koki, un cacatoès. C’est venu de mon amour pour les livres racontés par des animaux et de mon horreur doublée d’un malaise vis-à-vis de la façon dont les animaux sont souvent représentés dans les documentaires – et recouverts par la narration humaine. Je fais souvent des films avec des narrateurs très variés. Avec ce projet, j’ai fait de nombreux tests avec plusieurs perroquets, jusqu’à ce que, alors que je travaillais sur un projet concernant l’État et les mouvements frontaliers, j’ai rencontré Koki, le perroquet de Tito, et j’ai immédiatement su que j’avais mon narrateur.
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Koki est crédité pour l’écriture du film dans le générique de fin. Pourrais-tu nous en dire plus sur ce choix ?
C’était un travail collaboratif, tous les mots du film ont été prononcés par Koki, et Koki est très réactif au matériel audiovisuel, donc la plupart des fils narratifs proviennent des associations de Koki avec des images d’archives et de l’audio – à un niveau verbal, performatif et surtout émotionnel. J’adore écrire mais je n’aime pas écrire à partir de rien, alors j’ai écrit avec Koki. Certaines idées que j’ai eues, comme celles sur l’Indonésie, Sukarno et Suharto, n’ont pas trouvé d’écho chez Koki de la même manière que, disons, Sophia Loren ou les chiens. Comme le film raconte l’expérience de Koki, nous avons suivi son point de vue au montage.
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Pouvez-vous nous en dire plus sur la place que vous laissez à l’humour, que l’on retrouve à la fois dans ce que dit Koki et dans le contraste entre ses phrases et les images sérieuses qui sont utilisées pour illustrer ?
L’humour, et l’humour physique en particulier (qu’il soit colérique, flegmatique, sanguin et mélancolique), sont des matériaux importants. Ils rendent les choses fluides, sans eux les saisons, les étapes de la vie et l’histoire sont comme figées. Il s’agit donc d’introduire du mouvement dans des histoires enfouies, bloquées, figées. La durée est l’essence-même de l’humour, et surtout depuis le cinéma des origines, le mouvement est un outil intrinsèquement humoristique.
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Qui sont vos cinéastes de prédilection et/ou qui vous inspirent ?
Je m’intéresse aux cinéastes littéraires : ceux qui font de la comédie comme Preston Sturges et Ernst Lubitsch, puis Hong Sangsoo, Marguerite Duras, Luc Moullet, Mary Ellen Bute, Abbas Kiarostami. Par littéraire, je n’entends pas nécessairement centré sur les mots ou la langue. Visuellement, j’aime être très omnivore et réutiliser des langages visuels et des moyens d’expression qui viennent de partout, qu’il s’agisse d’anime de science-fiction, de méthodes d’apprentissage des langues ou de TikTok.
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Quelle a été la dernière fois que vous avez eu le sentiment de regarder quelque chose de neuf, de découvrir un nouveau talent à l’écran ?
Depuis que j’ai travaillé sur ce film, j’ai cherché des précédents concernant le travail créatif des animaux, et je dois rendre hommage au cheval dans Un cœur pris au piège de Preston Sturges, qui a un désir intense de se joindre aux humains et à leur intimité. Cela permet de grandes ruptures comiques lors de scènes romantiques entre Barbara Stanwyck et Henry Fonda, mais du point de vue du cheval, c’est une tragédie sur un animal domestique, échouant dans son désir de devenir une personne. Je m’identifie beaucoup à ce cheval, car j’ai l’impression que les gens sont des animaux qui échouent à devenir des humains.
Entretien réalisé par Nicolas Bardot le 6 février 2025.
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