Berlinale | Entretien avec Lucía G. Romero

Déjà remarquée avec son très prometteur Cura sana (qui faisait partie de notre dossier sur les meilleurs courts de la Berlinale de l’an dernier), l’Espagnole Lucía G. Romero passe au niveau supérieur avec ce Casi septiembre présenté en compétition à la Berlinale 2025. On croit connaître ce décors d’amours de vacances, mais Lucía G. Romero déploie un sens du romanesque qu’on n’avait pas vu venir dans ce récit queer aux personnages puissants. Elégamment mis en scène, ce film au ton vif possède une écriture subtile qui laisse une place vibrante à l’irrésolu. Casi septiembre figure dans notre dossier des meilleurs courts de la dernière Berlinale. Lucía G. Romero est notre invitée.


Quel a été le point de départ de Casi septiembre ?

Le point de départ du film a été ma propre blessure d’abandon. Je voulais explorer et dépeindre ce que ça fait d’avoir des figures parentales instables dans l’enfance, et quels effets cela peut avoir sur les gens une fois qu’ils grandissent.

Comment vous est venue l’idée de raconter l’histoire dans ce camping où vit Alejandra ?

Le camping semblait être une bonne représentation extérieure du monde intérieur d’Alejandra. Il est rempli d’expériences temporaires, de distractions sexy et d’un manque de stabilité. On dirait un paradis, mais il est vide ; une fois septembre arrivé, ce sera à nouveau un lieu de solitude.



Alejandra semble très proche de Jessica, l’héroïne de votre précédent court-métrage Cura sana : elles sont toutes les deux fortes mais ont tout autant peur d’être vulnérables. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce point commun ?

Je vous remercie de cette remarque. Je me reconnais dans cette manière de protéger sa propre sensibilité dans un monde hostile. Je pense qu’il est intéressant d’explorer ce qui se cache derrière la colère ou le fait d’être sur la défensive. Je suppose que j’aime briser ces murs et voir à travers la façade, de la même manière que j’aimerais que quelqu’un puisse voir à travers la mienne.

Il y a quelque chose de profondément romantique entre Alejandra et Amara – mais c’est aussi une relation complexe. Pouvez-vous nous en dire plus sur votre processus d’écriture et votre approche de cette histoire d’amour ?

Je pense que le lien entre elles est très simple. L’attirance et le magnétisme, c’est quelque chose qui est très animal. Ce qui rend cette dynamique complexe, c’est la blessure d’Alejandra. Lors de l’écriture de l’histoire d’amour, il était important pour moi que le spectateur puisse ressentir son anxiété, son anticipation de la douleur même lorsque les choses vont bien. Sa réticence à l’idée de se rapprocher d’Amara est un signe qu’elle est spéciale, qu’elle pourrait vraiment la blesser si les choses tournaient mal. Mais elle veut aussi plonger profondément dans l’amour, comme le font tous les humains. C’est ce qui crée cette dynamique de rejet et d’attraction à la fois entre elles. C’est la peur et l’amour.



Comme pour Cura sana, vous collaborez avec Gemma de Miguel sur la photographie. Comment avez-vous abordé ensemble la mise en scène de cette histoire ?

Gemma et moi, nous privilégions toujours les éléments narratifs avant le style ou le visuel. Nous nous sommes donné la liberté de filmer chaque scène de la manière dont nous avions besoin, en essayant de ne pas créer de dogme dans le film. Il est également très important pour moi que les plans donnent l’impression de pouvoir s’immerger dans l’univers des personnages, nous avons donc essayé de dépeindre non seulement ce qui se passait avec les protagonistes, mais aussi ce qui se passait autour d’elles.



Entretien réalisé par Nicolas Bardot le 26 février 2025. Un grand merci à Alba Laguna.

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