God of the Piano est le premier long métrage de l’Israélien Itay Tal. Dévoilé fin janvier au Festival de Rotterdam, God of the Piano raconte l’histoire d’une femme accouchant d’un fils qu’elle espère virtuose du piano… mais celui-ci naît sourd. Le résultat est un drame mordant, d’une brutalité parfois glaciale. Itay Tal est notre invité de ce Lundi Découverte.
Quel a été le point de départ de God of the Piano ?
L’idée initiale du film m’est venue en 2011 alors que j’étais étudiant à la Tisch Film School, à l’Université de Tel Aviv. J’étais avec un ami à moi quand soudain une image s’est imposée à moi de façon très nette. J’ai dû interrompre la conversation avec mon ami pour m’asseoir et mettre immédiatement sur papier ce qui me semblait pouvoir être le point de départ d’un film profond. A ce stade, il n’était pas encore question de musique ou de piano. Le contexte musical n’est venu qu’après différentes réécritures du script.
Le début du film est très surprenant : les événements s’enchainent très vite et de manière assez choquante. Avez-vous jamais envisagé de débuter votre film autrement ? Pouvez-vous nous en dire plus sur cette ouverture ?
Les scènes à l’hôpital au début du film sont en fait les premières choses que j’ai imaginées. Je n’ai jamais envisagé de débuter le film autrement car ce sont précisément ces scènes qui ont fait naître chez moi le désir d’écrire le scénario de God of the Piano. Le choc des premières minutes de l’histoire m’a fait prendre conscience que j’avais entre les mains un personnage très spécial. J’ai voulu en savoir plus sur elle et comprendre ses cicatrices. Cela m’a un peu effrayé parce que ce n’est pas si facile à digérer et je n’étais pas sûr que le public me suivrait après ce début de film ! Mais je me suis lancé dans l’écriture, malgré mon incertitude. Je savais que ma peur était comme une boussole me guidant dans un voyage authentique et qui a un sens. Après les premières projections, nous avons eu des retours positifs et émus du public. Je pense que cela est dû en grande partie au travail superbe et convaincant de notre actrice Naama Preis.
Comment avez-vous abordé le style visuel de God of the Piano avec votre directeur de la photographie Meidan Arama ?
Meidan Arama est le seul directeur de la photographie avec qui j’ai travaillé. On s’est rencontré lors de notre première année à la Tisch School, et depuis je n’ai jamais trouvé de bonne raison de changer de chef op. Le talent de Meidan, c’est qu’il peut vraiment proposer un langage unique pour raconter une histoire. Il ne reste pas bloqué sur un style de mise en scène en particulier ; si vous avez eu l’occasion de voir People That Are Not Me de Hadas Ben Aroya, vous avez pu constater à quel point son style est versatile. C’est pourquoi travailler avec lui est un vrai cadeau.
Notre alchimie fonctionnait déjà très bien, mais on s’est autorisé sur ce film à avoir plus de liberté. Il n’était pas question d’égo entre nous, et cela nous a permis de prendre des décisions plus courageuses qui ont rendu l’histoire plus forte. On s’est assis, on a laissé parler notre imagination. C’était parfois intuitif, et parfois on avait besoin de plus de temps pour expérimenter. En général, notre ligne directrice était de faire preuve de retenue et de ne pas laisser circuler d’air dans les plans. Que ceux-ci soit tendus. Et même si chaque plan était bien préparé, dessiné en amont, nous avons improvisé de temps en temps et je ne regrette aucune des décisions qu’on a prises.
Quels sont vos cinéastes favoris et/ou ceux qui vous inspirent ?
Je suis vraiment inspiré par l’œuvre de Michael Haneke. Je vois clairement son influence sur moi dans certaines scènes du film. Lars Von Trier est une autre grande influence. Et quelques mois avant le début du tournage, j’ai vu L’Institutrice de Nadav Lapid. J’en ai tiré là aussi beaucoup d’inspiration et le film m’a très certainement influencé.
Quelle est la dernière fois où vous avez eu le sentiment de voir quelque chose de neuf, de découvrir un nouveau talent ?
C’est un sentiment que je ressens tous les jours (rires).
Entretien réalisé par Nicolas Bardot le 24 février 2019.
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