Récent lauréat du prix du meilleur court métrage à la Semaine de la Critique, Montsouris de Guil Sela est cette semaine à l’honneur au Festival de Sarlat. Dans le parc Montsouris, deux jeunes cinéastes se demandent ce qu’ils pourraient bien filmer tandis que des mésaventures vont se dérouler sous leurs yeux. Guil Sela signe un film ludique et rafraichissant où la simplicité apparente laisse un espace précieux au regard attachant du cinéaste.
Quel a été le point de départ de Montsouris ?
Le point de départ a été la volonté de faire un film. Je ne savais pas encore quel film mais j’avais furieusement envie de tourner. J’ai donc pensé à quelque chose de très simple, de quotidien, que je pourrais tourner en une journée. Comme je ne savais pas exactement quoi raconter, j’ai pensé à raconter l’histoire de quelqu’un qui veut raconter mais qui hésite et se pose cette question qui devient centrale pour moi dans le film : qu’est-ce qui est intéressant ?
Pourquoi avoir choisi ce lieu en particulier pour votre histoire ?
Sur cette question mon cœur est mon esprit se sont rejoint. J’aime ce parc car mon grand-père, très présent dans la cosmogonie de ce film, m’y amenait quand j’étais petit. Mais on ne fait pas des films qu’avec de beaux sentiments et il se trouve que c’était aussi l’endroit rationnellement parfait pour placer mon film. Car le parc Montsouris dispose de cette petite colline, où j’ai positionné ma caméra, et qui offre une vue panoramique sur un chemin, un lac, de très beaux arbres et toutes sortes de détails qui me plaisaient. Cerise sur le gâteau, alors que le parc est en plein milieu de Paris, on y croise une grande quantité d’animaux – qui se sont concertés et ont décidés, le jour du tournage, de devenir comédiens !
Votre film emprunte au langage visuel de la caméra cachée. Est-ce que cela constituait l’une des racines de Montsouris ?
Je ne sais pas car je ne regarde pas beaucoup de caméras cachées à la télé, mais c’est sûr que pour un cinéaste l’idée de cacher une caméra est extrêmement séduisante. Dans Montsouris ainsi que dans mon prochain film, j’ai recours à ce dispositif qui consiste à mettre mes acteurs au milieu du vrai monde et à les filmer de loin, avec une longue-focale. Cela donne peut-être au spectateur du film ce sentiment d’assister par effraction à une situation, comme n’importe quel témoin de la vie quotidienne.
Comment avec-vous envisagé et trouvé le bonne distance pour filmer ce qui se passe dans votre court métrage ?
Je dois avouer que tout s’est assez vite formé dans ma tête avec une certaine clarté. J’ai tout imaginé en même temps. Je voulais que l’on voit tout de l’œil d’un témoin, et donc que l’action soit des fois cachée par une branche d’arbre, que les personnages ne soient pas forcément de face, que l’on garde à l’étalonnage les fausses teintes (ces moments où des nuages passent et l’image s’assombrit…). Tout cela était très important pour moi. Il était inenvisageable de découper le film comme un film classique !
Qui sont vos cinéastes de prédilection et qui vous inspirent ?
Je voue une passion difficilement communicable au cinéaste iranien Abbas Kiarostami. Il me semble qu’il a mené le cinéma a un niveau d’humanité et de simplicité incomparable. Et la photographie de ses films est merveilleuse ! J’aime aussi la légèreté des films de Nanni Moretti, son humour, et sa manière de mêler l’intime au politique. J’aime aussi Agnès Varda, Alice Rorchwacher, Takeshi Kitano, Hirokazu Kore-eda, les Frères Safdie et tant d’autres !
Quelle est la dernière fois où vous avez eu le sentiment de voir quelque chose de neuf, de découvrir un nouveau talent à l’écran?
Ca m’arrive tout le temps! Je ne suis pas trop intéressé par les gens qui clament trop haut leur originalité. Je crois que c’est Prévert qui disait “la nouveauté, c’est vieux comme le monde !”. Non, ce qui est beau et vrai est toujours nouveau ! Dans ce sens là, les derniers films qui m’ont renversé sont peut-être Aftersun, Perfect Days, et Huit et demi !
Entretien réalisé par Gregory Coutaut et Nicolas Bardot le 24 mai 2024.
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