Bilesuvar est le troisième long métrage du réalisateur azerbaïdjanais Elvin Adigozel. Ce drame à l’écriture singulière raconte les déboires de quelques personnages sous le ciel gris de la ville qui donne son titre au long métrage. Celui-ci a été dévoilé Festival de Busan et figure cette semaine en compétition au Festival des 3 Continents. Elvin Adigozel est notre invité.
Quel a été le point de départ de Bilesuvar ?
Il y a 2 ans, j’étais en voyage dans les régions du sud de l’Azerbaïdjan. Et je voulais trouver un endroit avec des paysages attrayants qui pourraient avoir un impact sur moi, et m’inspirer pour y raconter une histoire. Pour moi, il est toujours important ressentir l’atmosphère d’un lieu et des gens qui y vivent. Dans le district de Bilesuvar, j’ai trouvé quelque chose d’inhabituel, une atmosphère bizarre qui a vraiment déclenché mon désir de faire un film là-bas. Puis, tout en faisant des recherches, j’ai commencé à écrire une histoire sur 5 personnages qui sont liés les uns aux autres à travers des lignes subtiles. Ce qui comptait avant tout, c’était que je ne voulais pas avoir de structure explicite en ce qui concerne la connexion entre les personnages. Voilà le point de départ de l’histoire à Bilesuvar.
Le tout début et la toute fin de Bilesuvar, avec leurs images muettes sur la ville et la nature, sont très intrigants. Pouvez-vous nous en dire davantage sur ces séquences ?
Je suis toujours à la recherche de nouvelles approches de cinéma. C’est comme chercher de nouveaux dialectes – mais pas forcément de nouvelles langues, parce que chercher une nouvelle langue peut pousser un cinéaste à faire des expériences juste pour expérimenter. Les deux séquences muettes dont vous parlez combinent en quelque sorte l’atmosphère du film. Parce qu’aujourd’hui, la tendance dans le cinéma est de faire des images visuellement séduisantes avec si possible une mise en scène, une caméra très visibles. J’ai fait cela en opposition ; ces images muettes, c’est comme si elles étaient vues par quelqu’un qui est là, mais qui est aussi absent. Pourquoi ces images sont-elles muettes ? Parce que le silence pousse à imaginer le son.
Au générique de fin, le nom des acteurs et de leurs personnages sont identiques. Quelle était la part de fiction et d’approche documentaire dans votre film ?
Travailler avec les acteurs est l’une des étapes cruciales pour moi, parce que je suis aussi acteur. Dans Bilesuvar, le premier personnage qui va à l’armée, le professeur et la chanteuse sont des personnes réelles, elles ne composent pas un rôle. Mais j’ai beaucoup travaillé avec eux sur les personnages que je voulais montrer. Ils donnent quelque chose de leur vie, mais jouent aussi une histoire fictive que je leur présente. Par conséquent, je voulais garder leurs vrais noms dans le film. D’autres acteurs principaux, comme le metteur en scène de théâtre ou le réalisateur de clips ont également joué avec leur propre nom, c’était une approche particulière pour créer une sorte de cohésion. Ils ont fait de leur mieux, je pense, parce qu’ils croyaient de tout cœur à l’atmosphère du film.
Quels sont vos cinéastes favoris et/ou ceux qui vous inspirent ?
Je suis né dans un région assez reculée, sans cinéma, mais je suis tombé amoureux des films en les regardant à la télévision, via des cassettes VHS. C’est ainsi que j’ai découvert mes films préférés, mais je ne peux pas dire que j’ai un réalisateur favori. Pendant les processus de montage de Bilesuvar j’ai été inspiré en regardant le film Santiago Loza intitulé Extrano. J’avais vu ce film auparavant, et il m’a beaucoup aidé lors de cette étape du film.
Quelle est la dernière fois où vous avez eu le sentiment de voir quelque chose d’inédit, de découvrir un nouveau talent ?
Il y a quelques mois, j’ai vu un film qui s’appelle Blanc sur blanc de Théo Court, et cela correspond tout à fait à la définition de nouveau talent.
Entretien réalisé par Nicolas Bardot le 24 octobre 2020. Un grand merci à Etienne de Ricaud.
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