À la recherche de leur première maison, un jeune couple effectue une visite en compagnie d’un mystérieux agent immobilier et se retrouve pris au piège dans un étrange lotissement.
Vivarium
Irlande, 2019
De Lorcan Finnegan
Durée : 1h38
Sortie : 11/03/2020 (ressortie le 22/06/2020)
Note :
DANS LA MAISON VIDE
La première bonne idée très contemporaine de Vivarium, second long métrage de l’Irlandais Lorcan Finnegan, est de faire de l’agent immobilier le croquemitaine moderne. Dès que Gemma et Tom, jeune couple trentenaire de la classe moyenne blanche, entrent dans la boutique de l’agent Martin, le grotesque horrifique s’installe. Sans trop en dévoiler de l’intrigue du film, Martin va leur faire « une offre qu’ils ne pourront refuser ». Littéralement.
Dans Vivarium, le fantastique et la SF naissent d’un postulat qui pourrait être celui d’un épisode de La Quatrième dimension. Ce point de départ est déjà assez vertigineux et prometteur, mais finalement, la tension surnaturelle dans Vivarium vient avant tout… de la normalité. Sauf que cette normalité, sous le regard joueur et mauvais esprit du cinéaste, est poussée jusqu’à la bizarrerie. Quelque part dans une banlieue de Stepford Wives, les nuages ont tous des formes de nuages, et c’est bien pour cela qu’ils sont étranges. La notion de normalité dans Vivarium est aussi incongrue qu’un manuel rédigé dans une langue étrangère, aussi stupide qu’une chambre peinte en bleue pour accueillir un bébé garçon.
Les métaphores de Vivarium sont assez lisibles, et ce pourrait être un défaut dans un drame réaliste. Mais le ton de fable grotesque déplace les registres, et surtout ces allégories ont de la ressource. Vivarium est un film sur la banlieue comme un univers mort-vivant, un film sur la consommation zombifiante, un film sur l’absurde comédie familiale, un film sur l’enfer du modèle hétérosexuel. Ces lectures se succèdent et dialoguent entre elles, évitant au film d’être un unique propos plaqué.
Dans Vivarium, les cieux sont fake, les fraises sans goût, et les Sims errent ou creusent des trous. Concernant le surréalisme, Finnegan cite en interview la thématique voisine de La Femme des sables de Hiroshi Teshigahara ou l’esthétique de Magritte. Le travail sur la direction artistique est remarquable, comme l’usage assumé d’une « lumière de studio » qui ripoline le réel jusqu’à l’étrange fantaisie. Ce labyrinthe en boucle se frottait à un risque : celui de la répétition mécanique. Il n’y échappe pas entièrement dans une seconde partie plus fragile. Mais le film reste une proposition originale et réussie, portée également par la qualité de ses deux acteurs principaux.
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par Nicolas Bardot