Festival de Rotterdam | Critique : Vitrival

Deux policiers tentent de calmer les inquiétudes des habitant.es de Vitrival face à un nombre croissant de suicides dans leur paisible village.

 

Vitrival
Belgique, 2025
De Noëlle Bastin et Baptiste Bogaert

Durée : 1h49

Sortie : –

Note :

PANIQUE AU VILLAGE

Connaissez-vous Vitrival ? Il s’agit pourtant, si l’on en croit le titre international de ce drôle de film, du « plus beau village du monde ». Il a beau planer sur ce patelin un air de loufoquerie pas possible, Vitrival ne sort pas de l’imaginaire des cinéastes auteurs de ce film. Le village existe bel et bien dans la campagne belge, pas très loin de Charleroi, même s’il l’endroit n’est même pas assez grand pour être officiellement considéré comme une commune à part entière, si l’on se fie à Wikipedia. Or, celles et ceux qui s’attendent à trouver ici à un portrait documentaire de Vitrival vont rapidement glisser sur une peau de banane, car ce ne sont pas les gags qui manquent.

Benjamin et le petit Pierre forment un duo de policiers chargés de faire régner l’ordre dans les quelques rues de ce village où tout le monde se connait. La tâche pourrait paraitre aisée mais il y a fort à faire car les suicides commencent à se multiplier dans la population locale. Les habitants n’ont pourtant pas l’air de s’en morfondre ou de paniquer. Chacun poursuit ses activités quotidiennes gentiment banales, des répétitions de chorale aux émissions de la radio locale (où le fait que « Catherine a perdu son foulard » fait office de flash info). Ah si, il y a bien un vrai problème grave qui secoue les lieux : mais qui a bien pu faire ces satanés tags de zizis sur les murs de l’église ? L’affaire et grave, la menace d’un « cauchemar de sexe » plane sur Vitrival.

C’est un drôle de regard que les cinéastes belges Noëlle Bastin et Baptiste Bogaert (qui signent ici leur premier long métrage) posent sur ce petit monde lunaire fait de joueuse de tambour bougonne et d’offrandes dans des boites de Nesquik. Ce pittoresque risible y est vu à travers un filtre humoristique qui s’approche souvent de la moquerie mais qui parvient à chaque fois à bifurquer avant de sombrer dans le cynisme. Il y a là un effet de réel qui donne l’impression que tout le monde fut de mèche pour composer ce réjouissant portrait de bêtise. Les crédits du générique de fin révèlent d’ailleurs que les acteurs portent tous le nom de leur personnage, ou vice-versa. Comme si tout le monde venait de jouer une version fictionnalisée de soi-même, ou comme si on était quand même un peu dans du documentaire.

La sélection de Vitrival en compétition officielle au Festival de Rotterdam rappelle celle d’un autre film francophone récent : Excess Will Save Us. Outre leur capacité à faire rire, les deux œuvres ont en effet en commun de faire le portrait attachant et sans condescendance d’une folie douce rurale. Toute singulière qu’elle soit, la note qui compose le ton de Vitrival manque peut-être de variations pour tenir toute la longueur et le résultat demande paradoxalement une attention certaine. En revanche, les cinéastes ne mégotent pas sur le soin apporté aux cadrages, qui viennent apporter dynamisme et mystère à certaines scènes, une formule qui peut évoquer Roy Andersson ou Bruno Dumont. On aimerait voir plus souvent des comédies apporter une telle attention à l’image. 

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par Gregory Coutaut

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