Critique : Ulbolsyn

Ulbolsyn, ancienne actrice de publicité, évolue dans la haute société kazakhe. Sa petite sœur Azhar est kidnappée par le frère d’un maire de la campagne pour l’épouser de force. Ulbolsyn, furieuse, vient au village pour ramener Azhar avec elle.

Ulbolsyn
Kazakhstan, 2020
De Adilkhan Yerzhanov

Durée : 1h10

Sortie : –

Note :

SŒUR SOURIRE

Si le cinéma, par la force des choses, tourne un peu au ralenti depuis un an, cela n’arrête pas le Kazakh Adilkhan Yerzhanov (lire notre entretien) dont on a pu voir trois nouveaux films ces douze derniers mois : A Dark, Dark Man sélectionné à Black Movie l’an passé et sorti (trop brièvement) cet automne en France, Yellow Cat montré à la Mostra et Busan à la rentrée, et enfin Ulbolsyn, déjà primé au Festival Black Nights de Tallinn et présenté en ouverture de cette nouvelle édition du Black Movie.

Cela n’arrête pas non plus la réussite du cinéaste qui signe un nouveau film remarquable. Ulbolsyn paraît plus humble en apparence : c’est un récit très resserré (1h10), moins contemplatif que ses précédents longs qui se déroulaient sous un ciel à perte de vue. Yerzhanov installe une atmosphère décalée dès le premier plan de son film et parvient à rendre cool le port d’une minerve – comme celle arborée par l’héroïne dans une bagnole baignée de synthpop nostalgique qui semble surgir d’un Nicolas Winding Refn.

On est pourtant bel et bien chez Adilkhan Yerzhanov : le temps d’un clin d’œil lorsque le véhicule rentre dans le village de Karatas (qu’on sait maudit depuis l’un de ses précédents films) mais aussi avec cet étonnant mélange de tons propre à son cinéma. Plus épuré, Ulbolsyn fonctionne à nos yeux encore mieux et ses ruptures de ton, du drame social au thriller en passant par la farce, s’enchainent aussi harmonieusement que des triples sauts délicats de patineuse.

On sait l’attention que Yerzhanov peut porter aux couleurs : le rouge et le jaune sautent aux yeux, décollent du réel comme ils le rehaussent. Mais cette attention s’étend à un sens du détail dans le cadre : les touches de couleurs certes, mais aussi des compositions particulières et expressives. Les couleurs tendres des maisons créent un doux contraste dans la neige, et font ressortir le silence hébété de ce décor lunaire, endormi sous les flocons. C’est une histoire qui emprunte au genre, c’est une comédie avec des pieds nickelés, c’est un drame réaliste aussi. Et Yerzhanov filme cela avec pas mal de culot, à l’image de ce dénouement gonflé qui confirme qu’Ulbolsyn peut aller où il veut.

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par Nicolas Bardot

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