Berlinale | Critique : Two Times João Liberada

João, une actrice lisboète, est à l’affiche d’un biopic sur Liberada, qui a été persécutée lors de l’Inquisition au Portugal au XVIIIe siècle. Bien que le réalisateur du biopic semble avoir un penchant pour la représentation de la violence et de la souffrance à l’écran, l’histoire de Liberada est finalement une histoire de force, de résilience et de rébellion contre les rôles de genre établis. La production devient un champ de bataille alors que João se heurte au réalisateur sur la façon dont l’héritage de Liberada devrait être dépeint.

Two Times João Liberada
Portugal, 2025
De Paula Tomás Marques

Durée : 1h10

Sortie : –

Note :

POINT DE VUE, IMAGES DU MONDE

Quelles responsabilités porte t-on lorsqu’on adapte à l’écran la vie d’un personnage ayant réellement existé ? La question posée par Two Times João Liberada est passionnante et elle est explorée de manière intelligente par sa réalisatrice, la Portugaise Paula Tomás Marques, qui signe ici son premier long métrage. Dévoilé en première mondiale à la Berlinale dans la compétition Perspectives dédiée aux découvertes, Two Times João Liberada, qui n’a pas peur des mises en abyme, s’ouvre par un tournage auquel on assiste à travers son making of et qui lui-même est commenté par une voix-off. L’exercice analytique, qui peut parfois s’avérer laborieux, possède aussi sa dimension ludique.

Bien que filmée en un chaleureux 16mm, l’histoire de Liberada, personne non-binaire persécutée lors de l’Inquisition dans le Portugal du 18e siècle, finit par poser question sur le tournage. La vision du personnage-réalisateur est discutable selon son héroïne-actrice. En mettant en scène la violence, quelle violence reproduit-on ? Quelle perspective privilégier sur cette héroïne singulière, qu’est-ce qui change tout dans son histoire si l’on choisit de raconter ce segment-ci ou cette partie-là ? En creux, Two Times João Liberada s’interroge de manière particulièrement pertinente sur la difficulté d’archiver et de mettre en scène l’Histoire queer.

Sans trop en dévoiler car la surprise est délicieuse, Two Times João Liberada se permet une très nette rupture de ton à la fois vertigineuse et hilarante, offrant une respiration parfaitement inattendue au long métrage. Ce virage s’avère finalement tout à fait légitime quand on en vient à demander l’avis des premières personnes concernées à l’heure d’adapter leur histoire. Du procédé réflexif à la dimension fantaisiste en passant par l’approche politique, Paula Tomás Marques propose un regard très actuel sur la manière de modeler un personnage, examinant le rôle important de celles et ceux qui transmettent et racontent.

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par Nicolas Bardot

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