Sundance | Critique : The Virgin of the Quarry Lake

Trois adolescentes de la banlieue de Buenos Aires tombent amoureuses de Diego. Silvia, la plus âgée et expérimentée des trois, fait tout pour capter rapidement l’attention du jeune homme.

The Virgin of the Quarry Lake
Argentine, 2025
De Laura Casabé

Durée : 1h33

Sortie : –

Note :

L’APPRENTIE SORCIÈRE

Un été chez grand-mère. Natalia a peut-être encore l’âge d’être envoyée chez mamie, elle approche surtout de celui des premiers expériences amoureuses. Jeune ado encore coincée dans un corps quasi-adulte, comme si ce dernier avait grandi trop vite pour elle, Natalia est la plus charismatique de sa petite bande d’amies. Cela ne l’empêche pas de s’empêtrer dans des mensonges pathétiques pour avoir l’air cool auprès des grands, en particulier auprès du beau Diego dont Natalia et ses deux meilleures amies sont toutes amoureuses. Dommage que ce dernier soit toujours flanqué d’une fille de son âge. Le genre de fille qui n’a besoin d’aucun effort pour avoir l’air sexy et sûre d’elle. Le pire, c’est qu’elle est hyper sympa. Natalia bout déjà de jalousie.

La cinéaste argentine Laura Casabé adapte ici harmonieusement plusieurs nouvelles de l’autrice Mariana Enríquez, avec le concours scénaristique de son compatriote Benjamin Naishtat (Historia del miedo, El Profesor). Le résultat est un récit d’émancipation malpoli sur lequel plane un excitant danger surnaturel. L’expérience d’une première jalousie amoureuse prend ici des airs de brouet d’apprentie sorcière avide de plaire mais aussi de rendre enfin les coups qu’on lui donne, comme une cousine de la Carrie de Stephen King.

Ce plaisant scénario obéit à un rythme quelque peu imparfait, où les éclats succèdent à des suggestions nettement plus placides. Ce tangage est néanmoins rééquilibré par la qualité supérieure du travail sur le son (comme souvent dans le cinéma d’auteur argentin) et par une photo aux couleurs vives qui font de ce visionnage une expérience très sensorielle. L’élément liquide est présent dès le premier plan, qui dépeint une baignade aussi paisible qu’un environnement amniotique mais qui laisse très vite place à une flaque de sang éclatante comme un désir érotique. D’ailleurs, le lac qui donne son titre au film est une carrière réaménagée dont l’eau est plus pure qu’ailleurs mais à propos duquel on raconte de sombres histoires.

Quand elles ne rêvent pas de baisers ou de tortures (ou des deux à la fois, comme dans une scène choc et jubilatoire), Natalia et ses amies s’échangent des CDS et parlent sur ICQ. Ces repères temporels discrets mais bel et bien présents viennent apporter un niveau de lecture supplémentaire à ce récit : celui de la crise économique de 2001, période où beaucoup d’Argentins ont vu leurs possessions leur glisser entre les doigts du jour au lendemain. Ce n’est sans doute pas un hasard si l’adolescence fantastique de Natalia débute par une malédiction lancée par un clochard. Drame sauvage plus que véritable film d’horreur, The Virgin of the Quarry Lake possède quelques éléments monstrueux mais demeure visible par tous les publics.

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par Gregory Coutaut

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