Critique : The Sweet East

Lilian, jeune lycéenne, fugue durant un voyage sco­laire. Au fil de ses ren­contres, elle découvre un monde insoup­çon­né. Les frac­tures men­tales, sociales et poli­tiques des États-Unis, fil­mées comme un conte de fée ou une varia­tion d’Alice au pays des merveilles.

The Sweet East
Etats-Unis, 2023
De Sean Price Williams

Durée : 1h44

Sortie : 13/03/2024

Note :

VOYAGE IMMOBILE

Lillian est en voyage scolaire avec ses camarades à Washington. Tout comme l’Alice de Lewis Carroll prenait la poudre d’escampette au milieu d’une leçon, Lillian n’a rien contre l’éducation mais elle s’ennuie et le désir de faire l’école buissonnière et d’aller voir ailleurs si elle y est est plus fort que tout. Son lapin blanc, elle le rencontre sous la forme d’un mec sexy mais déglingué, créateur « artiviste » selon ses propres termes. C’est la première des rencontres improbables (de secte mascu en néo-nazis) qui vont jalonner l’étrange voyage de Lillian. Troquant les monuments historiques pour des bars minables, la voilà déjà joyeusement tombée dans le trou sans trop s’en inquiéter.

Récit picaresque à travers les marges des Etats-Unis, The Sweet East est réalisé par Sean Price Williams, jusqu’ici surtout connu en tant que chef opérateur pour les films des frères Safdie ou d’Alex Ross Perry (qui endosse ici la casquette de producteur). On retrouve ici son talent pour faire naitre une énergie très particulière rien que par la mise en image, une sorte de frénésie cool, l’atmosphère d’un rêve à la fois fiévreux et cotonneux. Une énergie qui donne beaucoup et qui demande aussi pas mal en échange, car aucun plan ne dure plus de quelques secondes et la caméra ne tient délibérément jamais en place. On suit Alice dans son terrier, mais on a surtout l’impression que le film s’amuse à nous mettre la tête sous l’eau. Pas facile de suivre le rythme.

Avec sa caméra qui refuse de se fixer sur quoi que ce soit, c’est comme si Sean Price Williams nous communiquait son appétit contagieux pour les chemins de traverse ne demandant qu’à être explorés. De fait, la mise en place de The Sweet East possède une énergie d’abord irrésistible, mais qui devient vite épuisante. L’impression excitante que le film pourrait aller partout est progressivement remplacée par celle, plus terre a terre, qu’il ne va peut-être nulle part. Le trip n’est pas trop désagréable mais est à réserver en priorité à ceux qui ne craignent pas les gesticulations.

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par Gregory Coutaut

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