Festival de Karlovy Vary | Critique : The Human Hibernation

Dans un monde où une surprise se cache derrière chaque plante grimpante, il n’y a pas que les animaux qui hibernent : les humains aussi. Or, se réveiller prématurément peut avoir des conséquences tragiques.

The Human Hibernation
Espagne, 2024
D’Anna Cornudella Castro

Durée : 1h30

Sortie : –

Note :

MA VRAIE NATURE

Présenté en début d’année dans la prestigieuse section Forum de la Berlinale, où il a d’ailleurs obtenu le prix Fipresci, The Human Hibernation vient témoigner de la grande qualité du tout jeune cinéma espagnol de ces dernières années. La cinéaste Anna Cornudella Castro, dont il s’agit ici du premier long métrage, plonge ici sa caméra en pleine forêt avec un sens de la poésie tout à fait remarquable. Avec un minimalisme impressionniste qui n’a besoin d’aucun effet spécial, elle fait de la nature le théâtre d’une science-fiction de poche. Dans le monde de The Human Hibernation, tout est en effet strictement semblable au nôtre, si ce n’est que les humains pratiquent l’hibernation sous la terre aux même titre que la plupart des autres animaux.

On ne devrait d’ailleurs peut-être pas parler de « notre » monde, car en filmant autant les animaux que les humains, la cinéaste nous tend un singulier miroir, inventant un nouvel ordre où l’Homme n’est plus au centre de l’univers. Les étranges scènes où hommes et femmes sortent de leur terrier, tous vêtus d’un bleu de travail (détail jamais vraiment expliqué) pourraient faire penser aux rituels absurdes des premiers films de Lanthimos, mais le regard de la réalisatrice est tout autre. The Human Hibernation s’ouvre ainsi sur une formidable séquence de 30 minutes dépourvue de dialogues, où simplicité enfantine et profond mystère marchent main dans la main.

Quand les humains repassent au premier plan lors de scènes davantage narratives et dialoguées, la grâce s’évapore en partie. Il y a des contre-exemples réussis, comme lorsqu’un jeune homme interroge ses parents (ses trois pères pour être exact, car les normes de la structure familiales sont ici également réinventées) sur l’origine de leurs croyances et traditions, mais les humains selon Castro font souvent pâle figure face au pouvoir de fascination de la nature. C’est quand celle-ci reprend enfin sa place centrale que le film peut alors évoquer les énigmes champêtres et mystiques du cinéma de Michelangelo Frammartino. L’ensemble manque parfois de rythme mais dans ses meilleurs moments, The Human Hibernation ressemble à un secret chuchoté dans un autre monde.

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par Gregory Coutaut

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