Même si les images ont été tournées avant la sidération pandémique qui a figé une bonne partie du monde au printemps 2020, le nouveau film de Sebastian Mez y fait immanquablement référence. Composé d’une série de plans fixes vidés de toute présence vivante, The Great Void regarde sans ciller, ni plus ni moins, l’agonie de notre civilisation.
The Great Void
Allemagne, 2021
De Sebastian Mez
Durée : 1h26
Sortie : –
Note :
SOUDAIN LE VIDE
The Great Void de l’Allemand Sebastian Mez n’a pas été tourné en temps de covid mais les images de ce documentaire donnent pourtant l’impression d’avoir été saisies en plein confinement. Il n’y a pas âme qui vive dans les rues de The Great Void ni personne aux fenêtres et la richesse du détail dans l’image est parfois fascinant. Qu’il s’agisse du gigantisme des villes ou d’un décor de western, le long métrage semble se dérouler après la disparition des humains sur Terre. Le vide partout, des grands axes routiers aux recoins endormis d’une maison, des collines de Hollywood à une cascade dans la nature.
Des traces humaines demeurent ici ou là, avec des photos d’êtres humains qui sont restées posées sur une commode ou accrochées au mur. La lumière grésille et peut s’allumer toute seule dans le décor, trompe-l’œil qui laisserait croire qu’il y a encore quelqu’un qui vit par ici. Mais le monde continue, et la lumière peut bien se rallumer sans être humain pour appuyer sur un bouton. Mez filme des vides paisibles, remplis de silences qui invitent à la contemplation.
Est-ce que tout cela se déroule aujourd’hui ou demain ? Le dispositif de The Great Void rappelle le travail de l’Autrichien Nikolaus Geyrhalter sur son envoûtant Homo Sapiens, dans lequel le cinéaste a filmé une compilation de lieux là aussi vides et où il ne restait que des ombres d’une humanité disparue. Mais il y avait chez Geyrhalter quelque chose de plus narratif (quand et dans quelles conditions ces lieux ont-il été abandonnés ?) et plus lunaire : certains plans invitaient science-fiction et paradoxes temporels dans le réel. Tout dans The Great Void rappelle un quotidien réduit à sa forme la plus épurée, et c’est aussi ce qui fait son mystère. La citation d’un poème de Brecht, An die Nachgeborenen (Aux nouveau-nés) ouvre une perspective après ce chaos calme, dans un film sur une société à bout de souffle mais aussi sur la possibilité d’une vie qui se poursuit.
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par Nicolas Bardot