Critique : Golden Glove

Hambourg, années 70. Au premier abord, Fritz Honka, n’est qu’un pitoyable loser. Cet homme à la gueule cassée traîne la nuit dans un bar miteux de son quartier, le « Gant d’or » (« GoldenGlove »), à la recherche de femmes seules. Les habitués ne soupçonnent pas que Honka, en apparence inoffensif, est un véritable monstre.

Golden Glove
Allemagne, 2019
De Fatih Akin

Durée : 1h55

Sortie : 26/06/2019

Note : 

LE MOUFFLE CROTTÉ

De Fatih Akin, on était resté sur la désagréable impression de In the Fade, téléfilm à nos yeux simpliste et vide aux effets kitsch. Golden Glove confirme (et de quelle manière) le naufrage artistique du réalisateur de Head On (il y a 15 ans) et de De l’autre côté (il y a 12 ans). Akin s’empare d’un fait divers qui a secoué l’Allemagne et Hambourg en particulier lors des années 70. Cela s’est passé hier, mais ce monstre misogyne pourrait aussi parler d’aujourd’hui. L’usage du conditionnel s’impose car sans point de vue, Golden Glove ne fait que relayer avec une complaisance façon Nouveau détective des meurtres terribles en esquissant à peine des personnages (le protagoniste est très moche et a du mal à avoir des érections – ça s’arrêtera là).

On pense un instant qu’Akin aura pris le parti du grotesque pour traiter de l’absurde laideur humaine. Un fait divers relaté façon Gros dégueulasse de Reiser. A ce titre, la première scène fonctionne plutôt bien dans le registre de la comédie extrêmement noire : on ne distingue pas trop si le héros (ou plutôt antihéros) baise mal ou fait mal à sa victime. Mais de toute façon, on a tort de voir si loin : lors de la conférence de presse, Akin parle de « dignité » (alors qu’on a rarement vu film plus indigne) tandis que le dossier de presse vend de l' »empathie« . Rapidement, le film empile effet sordide sur effet sordide. C’est la méthode Sorrentino : Akin parle de l’horreur, du sordide, du vulgaire, persuadé d’être sur sa jolie chaise d’arbitre bien lustrée. Mais ses outils et son cinéma sont horribles, sordides et vulgaires. La complaisance beauf atteint ici un niveau assez stellaire et le film, malgré sa direction artistique soignée, ressemble à un gros pâté.

Un mot enfin sur le traitement de la haine misogyne. Il y a peu de temps, sous forme de farce noire, Lars Von Trier proposait un début de réflexion et d’introspection, sans trop se ménager, dans The House That Jack Built. Ici, il n’y a aucune différence entre le regard atroce du protagoniste sur les femmes et celui du réalisateur, ni aucune réflexion. Les photos des victimes sont ajoutées au générique de fin, une insultante faute de goût lorsqu’on voit à quel point celles-ci sont traitées dans le film : actrices enlaidies, ridiculisées, filmées comme de la viande par le réalisateur. Le résultat serait irresponsable si le film n’était pas aussi nigaud.

par Nicolas Bardot

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