Berlinale | Critique : The Blue Trail

Tereza, 77 ans, a vécu toute sa vie dans une petite ville industrialisée d’Amazonie, jusqu’au jour où elle reçoit un ordre officiel du gouvernement de s’installer dans une colonie de logements pour personnes âgées. La colonie est une zone isolée où les personnes âgées sont amenées à « profiter » de leurs dernières années. Tereza refuse d’accepter ce destin imposé.

The Blue Trail
Brésil, 2025
De Gabriel Mascaro

Durée : 1h26

Sortie : –

Note :

LE BLEU EST UNE COULEUR CHAUDE

Dans un futur proche ou dans un aujourd’hui dystopique, les personnes de plus de 75 ans, au Brésil, sont invitées à ne pas traîner dans les pattes des actifs et vont être parquées dans des colonies lointaines. Le postulat de The Blue Trail, à l’heure de la post-vérité, est présenté autrement par les autorités : le film débute par des messages d’amour et autres preuves de digne considération. Mais comme toute bureaucratie qui enrobe son inhumanité dans des slogans, tout finit par ressembler à une insulte et à une infantilisation pour les protagonistes de The Blue Trail.

C’est ainsi que le ressent la première concernée, Tereza, 77 ans. Et elle, femme âgée mais indépendante, a assurément raison. Pour échapper à cette absurdité, Tereza s’enfuit. Le Brésilien Gabriel Mascaro construit un attachant récit picaresque, une sorte de survival twisté qui ne se baserait pas tant sur une tension de thriller, mais qui raconterait bel et bien le désir de survivre – ou de vivre tout court – de son héroïne. Ce mélange de genres donne sa personnalité singulière au film, notamment dans son traitement d’une subtile science-fiction qui rappelle son travail à la fois remarquable et minimaliste dans Divino Amor.

Poursuivie sur terre, Tereza tente sa chance sur le fleuve Amazone. C’est le lieu du réalisme magique et des rencontres improbables, le lieu également de tous les possibles. The Blue Trail évite les clichés mièvres sur les représentations de personnages âgés – d’ailleurs Tereza n’apprend pas qu’il lui reste bien des choses à vivre : elle en était convaincue dès le départ. Ce point de vue sans condescendance est d’une riche humanité et donne beaucoup de cœur à ce film qui délaisse, peut-être de manière d’abord déceptive, l’urgence d’une SF aux ingrédients ambitieux. Mascaro privilégie une chronique généreuse, avec son héroïne qui, littéralement, mène sa barque. L’ambition du film se trouve finalement ailleurs : dans ce portrait d’un avenir qui appartient à deux femmes queer et septuagénaires, avançant selon leurs propres règles.

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par Nicolas Bardot

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