A voir en ligne | Critique : Sauvage

Une jeune femme au morne quotidien rencontre un loup qui révèle en elle sa part animale…

Sauvage
Allemagne, 2016
De Nicolette Krebitz

Durée : 1h37

Sortie : –

Note :

LE PACTE DU LOUP

Au concours des pitchs les plus surprenants de l’année, Sauvage de l’Allemande Nicolette Krebitz peut au moins prétendre à une belle place sur le podium. Son troisième long métrage raconte comment l’existence d’une jeune femme à la dérive se retrouve bouleversée par sa rencontre… avec un loup. Sauvage s’ouvre sur son quotidien, froid comme le cœur d’un banquier. Même la musique qui passe en boite semble glacée, et pourtant Sauvage ne correspond pas à cette idée paresseuse et cliché d’un cinéma allemand qui serait éternellement grisâtre. Krebitz et son directeur de la photographie Reinhold Vorschneider (Le Braqueur, Les Amitiés invisibles) donnent quelques indices chromatiques dans cette image léchée, tachée ici et là de rose, de rouge, de carmin – comme le sang ou un bon morceau de viande.

La rupture incongrue, presque saugrenue, ouvre une porte vers le surréalisme. A l’orée du bois, Ania voit un loup qui semble s’être égaré aux abords de la ville. Plus qu’à une lecture psychanalytique, Krebitz nous invite davantage à une expérience viscérale qui poussera l’héroïne à sortir d’elle-même : qu’est-ce qui va l’encourager à rompre totalement le contrat qui la lie encore à la société ? La réalisatrice se concentre sur cet apprentissage et ce lâcher-prise en expulsant le reste, notamment l’environnement sonore qui semble tout le temps feutré, étouffé. On regrette même qu’elle ne soit pas allée plus loin dans l’épure, une bonne partie des scènes avec Georg Friedrich semblant assez superflues et venant déséquilibrer la narration.

Sauvage n’est jamais aussi bon que dans la solitude, ou plus précisément la solitude de l’héroïne face à son loup : chez elle, hallucinée, où la frontière avec le rêve est volontairement laissée floue ; dehors, dans les bois, où s’organise un drôle de rituel. Il y a dans Sauvage un sous-texte féministe, avec cette informaticienne qu’on utilise comme une simple serveuse de cafés et qui se libère par la transgression. Mais le jusqu’au boutisme de Krebitz emmène le film plus loin, jusqu’à ce dénouement mental franchement fascinant, et qui fait oublier les quelques faiblesses de cet aventureux long métrage.


>> Sauvage est à voir librement jusqu’au 11 février 2021 sur le replay d’Arte

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par Nicolas Bardot

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