Trois lieux, trois temps d’une soirée avec la jeunesse dorée de Genève.
Sapphire Crystal
France, 2020
De Virgil Vernier
Durée : 0h31
Sortie : 15/07/2020
Note :
PIÈGE DE CRISTAL
De Orléans à Sophia Antipolis en passant par Mercuriales (tous fascinants), le cinéma de Virgil Vernier n’a pas envie de trancher entre la fiction et le documentaire. Les deux semblent s’y superposer, la fiction en transparence du réel et inversement. Sapphire Crystal fonctionne de la même manière, encore une fois on a le sentiment de regarder un documentaire, encore une fois on se souvient que c’est peut-être une fiction, et encore une fois on oublie. L’illusion doc et la tension mystérieuse donnent à nouveau un mélange captivant et un ton unique.
Vernier filme la jeunesse dorée de Genève qui travaille avec papa. On parle de promotion immobilière, de création d’une ligne de vêtements au concept complètement flou. On échange sur des applis vampires, la drague est ennuyeuse à mourir. L’important est d’aligner les symboles de réussite même dans l’absurdité la plus totale : on claque un fric fou pour s’asperger de champagne hors de prix sans même le goûter, simplement parce qu’on le peut. Sapphire Crystal n’est pas un simple film-thèse ou un film social, mais délivre malgré tout un portrait sociétal, et dépeint un violent rapport de classe : cette jeunesse-là croit pouvoir littéralement déféquer dans la bouche d’autrui puisque si tout s’achète, elle a donc tous les droits.
Les images sont tournées par un iPhone comme elles le seraient lors d’une soirée. Le réel brut capte quelque chose de monstrueux, des réunions lugubres où le mauvais goût est maître – et on semble vivre comme ça. Vernier ne se pose pas en juge, son film plonge plutôt dans une étrange hébétude. On note malgré tout que dans la nuit noire qu’il filme, les enseigne Rolex ont remplacé les étoiles.
>> Sapphire Crystal est disponible en vod sur la plateforme de Shellac
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par Nicolas Bardot