Critique : Pas un mot

Lorsque Nina apprend que son fils adolescent, Lars, a été blessé dans un accident à l’école, elle est confrontée à un dilemme : peut-elle laisser de côté les répétitions avec son orchestre afin d’être totalement présente pour lui dans une situation qui pourrait changer sa vie ? Elle décide d’un compromis : pendant cinq jours, elle quittera Munich pour emmener Lars en escapade, sur l’île de l’ouest de la France où ils ont l’habitude de passer leurs vacances d’été…

Pas un mot
Allemagne, 2023
De Hanna Slak

Durée : 1h27

Sortie : 09/10/2024

Note :

LES MOTS SONT NOS VIES

Pas un mot : le titre du long métrage de la Slovène Hanna Slak ne ment pas, tant la moindre émotion semble incommunicable entre ses protagonistes. Une mère tente de renouer avec son fils blessé et visiblement traumatisé ; ils vont partir ensemble vers un lieu de vacances qui leur était autrefois familier. Mère et fils quittent des décors froids (leur maison, l’hôpital, pratiquement filmés en noir et blanc) pour un décor breton hors saison pas beaucoup plus jovial. Un lieu tout au bord du monde, où l’horizon est composé de mer inhospitalière en impressionnantes falaises.

A l’école, un mausolée pour une adolescente (disparue ? Morte ? Les mots ne sont pas immédiatement mis sur le drame) a été mis en place. Qu’est-ce qui se cache derrière ce mystère, si mystère il y a ? Difficile de le savoir car dans Pas un mot, on s’empresse surtout de ne parler de rien et de ne pas nommer les choses. On communique très vaguement par drone, et las, même quand on parle on ne capte pas. Par quelle maigre fissure l’émotion peut-elle faire son chemin ? Par le décor à la fois nu et grandiloquent ? Par la musique qui en contrepoint exalte des sentiments restés inexprimés par les personnages ?

Pas un mot manque, à nos yeux, de l’inspiration formelle et atmosphérique dont font preuve les grandes œuvres de l’Ecole de Berlin, où l’austérité apparente vient traduire un puissant tumulte intérieur. Le long métrage d’Hanna Slak, dont la construction est un peu engourdie, semble manquer de nerf et de direction. Les personnages sont dans une impasse et le film est presque pris au même piège. Pas un mot peut néanmoins compter sur plusieurs précieux atouts, comme la photographie de Claire Mathon et son usage délicat et expressif de la lumière – notamment sur le visage de Maren Eggert. Cette dernière, toujours excellente, sait exprimer un grande richesse de nuances en en faisant le moins possible dans ce rôle de cheffe d’orchestre chargée de guider les émotions. Elle est, avec discrétion, le cœur battant d’un film qui n’aurait rien perdu à être plus radical.

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par Nicolas Bardot

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