Festival de Gérardmer | Critique : Rabid

Rose, une jeune femme timide et effacée, travaille dans une maison de couture et veut devenir un jour une créatrice reconnue. Mais un terrible accident de moto met fin à ses rêves et la laisse complètement défigurée. Elle décide alors de se faire opérer dans une clinique de chirurgie esthétique aux traitements cellulaires expérimentaux. L’opération est couronnée de succès et avec sa nouvelle plastique, elle n’a rien à envier aux mannequins avec lesquelles elle travaillait auparavant. Mais dans la vie, tout a un prix, et sa nouvelle apparence ne déroge pas à la règle.

Rabid
Canada, 2019
De Jen & Sylvia Soska

Durée : 1h47

Sortie : 

Note :

FAUX-SEMBLANTS

Révélées par Dead Hooker in a Trunk mais surtout American Mary il y a quelques années, les sœurs Jen et Sylvia Soska incarnent une frange doublement alternative du cinéma : leur cinéma horrifique se situe dans les marges et leur female gaze les éloigne naturellement d’une horreur plus mainstream et manufacturée pour les garçons. L’annonce de leur présence aux manettes d’un tel projet (un remake de Rage de David Cronenberg) pouvait à la fois susciter une crainte (leur style va t-il s’affadir dans le dissolvant à remakes) mais aussi une curiosité : quel regard ces réalisatrices peuvent-elles porter sur le film original de Cronenberg à l’héroïne à peine dessinée ?

Les sœurs indiquent en tout cas assez vite qu’il ne faut pas prendre tout cela trop au sérieux. Un personnage de créateur de mode pontifiant explique dans Rabid qu’il ne faut pas faire de remake alors que c’est exactement ce que les Soska s’apprêtent à effectuer; et celles-ci apparaissent dans le film pour bousculer leur héroïne. Rayon female gaze, cette dernière est effectivement plus développée et la nudité dans Rabid est moins complaisante – on peut même y croiser du boytoy, cette créature dont l’équivalent féminin existe en milliards d’exemplaires dans le cinéma d’horreur mais qui, au masculin, est aussi rare qu’une licorne. Si le cinéma d’horreur est fait pour subvertir les règles, on peut le noter même pour des éléments en apparence futiles.

Rabid est aussi un produit d’aujourd’hui – et sans vouloir singer le grain de la version originale, son image reste extrêmement lisse voire parfois plate. Le goût pour le maquillage plus que l’effet numérique est, lui, peut-être plus rétro mais constitue toujours une bonne idée, a fortiori quand on trempe dans le body horror. La relecture en revanche ne tient pas ses promesses à nos yeux. Le récit mal construit est décousu, et perd de sa substance jusqu’à un dénouement en roue libre qui cède aux clichés. On espère voir les Soska aux commandes d’un projet plus entièrement personnel.

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par Nicolas Bardot

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