A voir en ligne | Critique : Pahokee, une jeunesse américaine

A Pahokee, petite ville rurale du sud de la Floride, le lycée ne ressemble à aucun autre. Avec son équipe de football américain invincible, ses concours et son extravagant bal de fin d’année, il rallie toute la communauté. À l’approche de l’entrée à l’université, quatre adolescents vivent une année pleine d’espoirs et de grandes célébrations.

Pahokee, une jeunesse américaine
Etats-Unis, 2019
De Ivete Lucas et Patrick Bresnan

Durée : 1h52

Sortie : 11/12/2019

Note :

LES COMBATTANTS

On découvre d’abord dans Pahokee, une jeune américaine un décor de Floride paisible où même les crocodiles semblent tranquillement endormis. La Brésilienne Ivete Lucas et l’Américain Patrick Bresnan s’aventurent rapidement dans un lieu porté par un énergie vibrante – un lycée qui pourrait ressembler à d’autres lycées américains. On y croise des futures reines de l’école et des apprentis dieux du stades, on suit des rituels ultra-codés. Lucas et Bresnan les filment avec suffisamment de fraicheur pour éviter le déjà vu.

Ce lieu a beau être archétypal, il est pourtant dans l’ombre. Les réalisateurs ont tourné leur documentaire dans une petite ville qui a été désertée par une bonne partie de ses habitants, et qui est touchée par un fort taux de chômage. Il ne semble rester plus que des familles fragiles et des gamins racisés, afro-américains ou latinos, dans ce coin qui paraît aux portes de l’oubli. Comme pour éviter de disparaître, on hurle à toute occasion dans Pahokee. Et on reproduit mécaniquement, comme par réflexe, une sorte d’idée de rêve américain de la gagne envers et contre tout.

Dans Pahokee, on cherche à gagner, à faire campagne, à rester invaincu. Pour l’emporter, il ne faut que « de la discipline ». On nous vend ici « l’université la plus sélective du monde », rien que ça. Il y a une force de vie qui plane ici, mais aussi une pression insupportable. Comme si ces gamins aux pieds du mur n’avait que le cours ou crève pour s’en sortir. Lucas et Bresnan, avec sensibilité, s’attachent au contraire à ce qui ne se maîtrise pas : une élection, une défaite sportive sur tapis vert, une fusillade qui tombe du ciel ou l’acceptation d’un dossier pour la fac. Pas si évident d’échapper au déterminisme social par la seule volonté individuelle.

Le portrait que dressent les cinéastes n’est ni pittoresque, ni didactique. « Dans un monde où chaque production médiatique hurle pour capter notre attention, nous créons un environnement où le spectateur peut s’arrêter, se relaxer et activer ses sens pour faire l’expérience du monde d’un autre point de vue ». Ivete Lucas et Patrick Bresnan laissent en effet de la place pour le spectateur dans cette année comme les autres et pas comme les autres, où la fierté de populations abandonnées est aussi une flamboyante armure. Pahokee ne dépeint pas un désespoir pour autant, bien au contraire, comme lorsque l’on voit des jeunes gens qui constituent la première génération de leur famille à aller à l’université. La réalité claudique mais ça n’empêchera pas les jeunes forces de vie ici filmées à marcher.


>>> Pahokee, une jeunesse américaine est visible en vod sur La Toile

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par Nicolas Bardot

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