Fin des années 50, début des années 60, la guerre d’Algérie se prolonge. Salah, Kaddour et d’autres jeunes Algériens sans ressources rejoignent l’armée française, en tant que harkis. Á leur tête, le lieutenant Pascal. L’issue du conflit laisse prévoir l’indépendance prochaine de l’Algérie. Le sort des harkis paraît très incertain. Pascal s’oppose à sa hiérarchie pour obtenir le rapatriement en France de tous les hommes de son unité.
Les Harkis
France, 2022
De Philippe Faucon
Durée : 1h22
Sortie : 12/10/2022
Note :
LA MALÉDICTION
Des portraits intimes qu’il a réalisé dans les années 90 (les poignants Sabine et Muriel fait le désespoir de ses parents demeurent d’une modernité qui mérite d’être redécouverte) à ceux, plus collectifs, qu’il signe aujourd’hui (Les Harkis mais aussi la minisérie Fiertés), le cinéma de Philippe Faucon donne souvent une fausse impression de miniature. Ses films sont courts, portent des titres souvent brefs, et font preuve d’une écriture et d’une mise en scène épurées. On pourrait les croire dans une retenue permanente et pourtant, par un paradoxe qui n’appartient qu’au cinéaste, ils véhiculent à la fois une acuité perçante et une émotion saisissante.
Cette fausse simplicité, cette volonté ambitieuse de tordre le cou à ce que l’on se contente de nommer « réalisme » ailleurs, est poussée vers un cran encore supérieur dans Les Harkis. En dépit de sa forme calendaire où les dates apparaissent régulièrement à l’écran (s’agit-il d’un effet didactique ou d’un compte à rebours inquiétant ?), en dépit d’une écriture factuelle et sobre qui se passe de commentaires psychologiques, Les Harkis est un film de guerre qui ne ressemble jamais à un film de guerre.
Bien qu’elle possède encore beaucoup de résonance dans l’inconscient postcolonial, la Guerre d’Algérie est encore très peu traitée dans le cinéma français, comme un tabou. Loin d’une explication Wikipedia, Philippe Faucon manie ici l’ellipse de façon impressionnante. Isolés dans des scènes très brèves et délibérément dépourvues de contexte, ses personnages sont pris dans un engrenage qui ressemble à une malédiction (vus comme des traitres par les Algériens, abandonnés par les Français). La radicalité de la mise en scène est parfois un frein à l’émotion attendue, tant elle transforme presque ses protagonistes en abstraction, mais ces derniers gardent néanmoins jusqu’au bout leur dignité.
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par Gregory Coutaut