Mati, 18 ans, vit avec ses deux parents dans la campagne autrichienne qu’elle sillonne avec arrogance sur sa moto-cross blanche, entourée par sa bande de copains. Lorsqu’elle rencontre Carla, tous les masques vont tomber…
L’Animale
Autriche, 2018
De Katharina Mückstein
Durée : 1h36
Sortie : –
Note :
UN TIGRE DANS LE MOTEUR
« J’ai l’air d’un clown » se plaint Mati lorsque sa mère veut la forcer à porter une robe. Aux apparats classiques et rose bonbon de la féminité, elle préfère la tenue de protection – presque une armure de guerrière – qu’elle revêt pour aller faire la moto avec ses potes. Comme les petits mecs avec qui elle traîne, Mati, 18 ans, est tantôt une enfant dans des vêtements trop grands, tantôt une adulte qui ne demande qu’à se libérer de ce qui l’enferme. A l’aise d’être la seule fille dans un groupe masculin, Mati se marre quand on la vanne, à condition qu’on l’appelle fille de pute plutôt que fils de pute. De toute façon, la pire insulte serait pour elle d’être une poupée. Mais quelque chose de plus relou encore l’attend au tournant : les premiers émois.
Des conventions amoureuses, Mati s’en moque pourtant. Les déclarations enflammées de programmes télé ne sont dignes que d’être parodiées, tandis que celles dans la vraie vie ne provoquent que l’embrassas. C’est alors que débarque Clara. Le récit d’apprentissage adolescent de L’Animale est relativement classique, mais il évite néanmoins certains écueils récurrents du cinéma queer (le personnage-martyre ou la naïveté irréaliste, par exemple). Ce n’est pas tant l’homosexualité qui pose ici problème que l’amour en général, et ses illusions.
Un oiseau blessé, une maison dont les travaux ne sont jamais vraiment terminés… les symboles sont lisibles, sans doute un peu trop (même si la relation Mati/Carla est elle symbolisée par un chat de toute beauté). C’est peut-être la limite d’une écriture qui se révèle par ailleurs plutôt fine. Ce portrait d’une famille bâtie sur la frustration, où tous les membres rêvent d’aller voir ailleurs, se fait parfois sur le ton de la comédie dramatique un peu bouffonne, tantôt avec une amertume inattendue. A l’image du chat cité plus haut, le film ronronne, parfois un peu plus matou domestique que tigre en cage, mais il retombe toujours du côté d’une morale à l’ambiguïté enthousiasmante : malgré tous les espoirs, l’amour reste une prison.
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par Gregory Coutaut