Critique : Invasion

Pourquoi tout le monde change-t-il soudainement de comportement ? Etsuko est-elle la seule à se rendre compte que son amie, son patron, son mari ne sont plus tout à fait les mêmes ? Peu à peu, elle réalise que les humains sont en train de perdre leurs émotions…

Invasion
Japon, 2018
De Kiyoshi Kurosawa

Durée : 2h20

Sortie : 05/09/2018

Note : 

LA MENACE FANTOME

Avant Invasion, il y a eu Avant que nous disparaissions, pièce de théâtre japonaise dont Kiyoshi Kurosawa a signé une adaptation cinématographique du même nom sortie en début d’année chez nous. Parabole hantée par des disparitions fantomatique, la pièce semblait être faite pour le cinéaste, tant elle offrait de nombreux échos à son œuvre fantastique. A tel point d’ailleurs, que Kurosawa ne s’est pas arrêté en si bon chemin. Invasion est en effet une série télévisée (ici remontée pour le cinéma), également adaptée de la pièce en question. Les personnages, les acteurs et les situations sont différentes, mais l’univers reste le même. Non pas une suite, mais un extended universe, en somme.

Par rapport à Avant que nous disparaissions, Invasion c’est à la fois la même chose et autre chose (inutile d’avoir vu l’un pour apprécier ou même comprendre l’autre). La première différence est visuelle: l’image est ici plus terre-à-terre, avec un grain typiquement télévisuel. Mais la chef-opératrice en or Akiko Ashizawa et à nouveau de la partie. Filmés par Kurosawa et elle, les visages et les lieux les plus familiers deviennent étranges et étrangers. La seule composition du cadre et de la lumière suffit à mettre en scène une inquiétante étrangeté, une menace fantôme.

Quand l’héroïne confesse dès la première scène: « Je me suis levée avec un un pressentiment« , on sait très bien ce qui l’attend – rien de moins que la fin du monde, et l’évaporation angoissante de tout le monde autour d’elle, prêts à tomber comme des dominos maudits. Variante de L’invasion des profanateurs de sépultures, le récit de Invasion demeure archétypal. Même passé à la moulinette d’un remontage efficace mais dans lequel on devine quand même où se situaient les coupures pub d’origine. Mais comme dans le décalé Avant que nous disparaissions (et ses touches d’humours imprévisibles), Kurosawa raconte cette histoire avec une vraie malice. Le ton est cette fois moins dingo, mais le cinéaste prend un plaisir contagieux et jubilatoire à faire passer cette inéluctable fin du monde par différentes cases, différentes familles de récits télévisuels archétypaux: feuilletons surnaturel, domestiques ou hospitaliers, parfois à l’intérieur même d’une même scène.

 

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In

par Gregory Coutaut

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