La Roche-sur-Yon 2019 | Critique : Hellhole

Trois personnes à la dérive tentent chacune de trouver leur place à Bruxelles mais doivent faire face à une inhospitalité quotidienne.

Hellhole
Belgique, 2019
De Bas Devos

Durée : 1h27

Sortie : –

Note : 

VERTIGE DE VIVRE

On avait repéré le cinéaste belge Bas Devos il y a cinq ans avec son premier film, le mystérieux Violet. Il y utilisait une formule que l’on trouve à nouveau ici : utiliser un traitement esthétique mélancolique et cotonneux pour traduire l’état de choc de ses personnages face à une brutalité incompréhensible. A l’origine de Hellhole (trou à rat, surnom cruel donné à la capitale Belge), il y a les attentats de mars 2016 dans le métro de Bruxelles. Devos décrit son film comme une réponse poétique mais pleine de doutes à ces événements. Les faits en question ne sont pas explicitement énoncés dans le film, mais ce que l’on retrouve en filigrane c’est une omniprésence policière et une paranoïa générale.

Dès le générique, le titre apparait sur un fond de ciel bleu. C’est l’unique touche d’ironie du film, qui privilégie par la suite la piste de la retenue digne. Est-ce la gravité du sujet qui a poussé le cinéaste a marcher sur la pointe des pieds, comme sur des œufs ? A force de retenir, certains non-dits disent paradoxalement beaucoup, comme ces plans sur une chaise laissée vide, ou ces débuts de phrases qui s’achèvent dans un soupir. Et quand la parole parvient à se libérer, les personnages n’échappent pas aux banalités (« c’est la vie ») ou aux monologues qui expliquent de façon un peu trop pratique leurs états d’âmes.

Un médecin et sa collègue,  une interprète (Alba Rohrwacher, toute en discrétion) et un lycéen, les quatre personnages que l’on suit sont tous au bord de la disparition, de plus en plus en marge d’une société qui ne sait plus quoi faire d’eux. Est-ce un paradoxe ou la suite logique de cette idée? Le film est surtout émouvant quand les personnages sont absents pour de bon de l’écran, quand  Bas Devos filme des bouts de Bruxelles comme une ville fantôme en devenir, froide et méfiante. Le temps d’un long zoom dans un amphithéâtre bondé (écho d’un des plus beaux passages de Violet) ou encore d’un impressionnant panoramique circulaire autour d’une maison de banlieue, le film nous donne effectivement un vertige amer.

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par Gregory Coutaut

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