Romy, PDG d’une grande entreprise, a tout pour être heureuse : un mari aimant, deux filles épanouies et une carrière réussie. Mais un jour, elle rencontre un jeune stagiaire dans la société qu’elle dirige à New York. Elle entame avec lui une liaison torride, quitte à tout risquer pour réaliser ses fantasmes les plus enfouis…
Babygirl
États-Unis, 2024
De Halina Reijn
Durée : 1h54
Sortie : 15/01/2025
Note :
FROM DIVA TO DIVA
Une quinquagénaire autoritaire et glaçante, maitrisant son entourage avec rigidité tout en matant avidement du porno en cachette, commence à perdre le contrôle de son quotidien en couchant avec un jeune homme aux intentions insaisissables venu faire son apprentissage auprès d’elle. Avez-vous déjà croisé ce résumé quelque part ? Lors de la récente promotion américaine de Babygirl, Nicole Kidman a en effet cité parmi ses films favoris La Pianiste de Michael Haneke. Admiratrice d’Huppert et cinéphile avérée, l’actrice n’a certainement pas attendu cette année pour découvrir ce long métrage. Cela tombe bien car Babygirl évoque par plusieurs aspects ce à quoi pourrait ressembler un remake hollywoodien de La Pianiste, projet improbable (et donc excitant) s’il en est.
Babygirl est bien entendu bien plus facile d’accès que le drame d’Haneke. Des sentiments masochistes complexes traversent l’héroïne sans que cela n’empêche l’ensemble d’être limpide et simple, ce qui peut se voir comme une qualité et un défaut à la fois. En effet, on retrouve ici les qualités confortables du cinéma d’Hollywood : rythme sans relâche, opulence des décors (l’austérité viennoise laisse ici place à un New York doré comme un cadeau de Noël). On y reconnait aussi certains défauts redoutés : mise en image à l’élégance lisse, habillages musicaux redondants et explications psychologiques un peu simplistes (Huppert aurait probablement jeté à la poubelles certaines pages du scénario aux bavardages superflus). Ces angles arrondis autour d’un récit pourtant pervers à souhait donnent un résultat parfois bancal mais drôlement intrigant.
La réalisatrice Halina Reijn ne vient pas des Etats-Unis mais des Pays-Bas, ce bagage cinématographique hollywoodien classique n’est donc a priori pas le sien. Quant à Nicole Kidman, sa filmographie riche en audaces laisse peu de doutes sur sa volonté de justement se débarrasser de cet héritage-là. La collaboration de celle qui arrive à Hollywood et celle qui en représente l’une des étoiles les plus libres accouche d’une dynamique étonnante qui fonctionne surtout dans des scènes bien particulières : lorsqu’il n’y a plus de dialogues. Dès que le scénario ose se passer de ces béquilles-là, dès que les interprètes n’ont plus que leur gestuelle pour exprimer brillamment l’ambiguïté labyrinthique de leur violents désirs, Babygirl brille avec cruauté.
L’autre grande réussite du film, c’est bien sûr l’interprétation de Nicole Kidman. Il y a certes quelque chose de presque trop évident, voire de redondant, à la voir endosser un nouveau rôle de maitresse femme dévoilant des fêlures vulnérables. Mais pourquoi être plus royaliste que le roi ? Si son personnage ne parvient plus très bien à maitriser sa liaison dangereuse, la Kidman rappelle une fois encore qui est la boss des actrices anglophones, prouvant que ce choix de casting est tout simplement parfait. L’actrice a d’ailleurs remporté pour ce rôle le prix d’interprétation à la dernière Mostra de Venise, remis par la présidente du jury qui n’était autre qu’Isabelle Huppert. La boucle est bouclée.
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par Gregory Coutaut