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Ari, 27 ans, professeur-stagiaire, s’effondre lors de la visite d’une inspectrice. Son père, très remonté de le voir défaillir, lui impulse de prendre le large. A fleur de peau, seul dans la ville, il se lance malgré lui dans une ronde de retrouvailles avec ses ancien.ne.s ami.e.s. Alors que les souvenirs des derniers mois reviennent par vagues successives, il découvre que les autres ne vont pas si bien qu’il l’aurait imaginé, et que quelque chose dort en lui.
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Ari
France, 2025
De Léonor Serraille
Durée : 1h28
Sortie : prochainement
Note :
JEUNE HOMME
« La couleur, la douceur » : voilà ce qui a motivé le choix du prénom d’Ari, personnage éponyme du nouveau long métrage de la Française Léonor Serraille. « La couleur, la douceur » que l’on retrouve dans les peintures d’Odilon Redon, vantées par la voix chuchotante d’une mère s’adressant à son tout jeune enfant. En un cut qui avale les années, on retrouve Ari adulte, tentant de se faire entendre dans une classe de maternelle. Complètement perdu, complètement déconnecté. « Je suis clairement pas à la hauteur », confesse le jeune homme de 27 ans, « mais qui est à la hauteur ? ».
Rappelant plus particulièrement le premier long métrage de la cinéaste, Jeune femme, Ari tente de déplier une carte pour essayer de survivre et trouver un chemin malgré les horreurs quotidiennes du monde contemporain. Ari n’a pas à porter le poids du monde sur ses épaules, mais néanmoins : comment vit-on quand on ne croit plus ? Qu’est-ce qui abîme, qu’est-ce qui éteint ? Ari pourrait raconter une sympathique lose tragi-comique mais l’écriture de Serraille creuse plus loin. C’est avant tout de cafard et d’angoisse dont il est question, d’un spleen d’époque que la réalisatrice saisit avec un émouvant relief.
De manière poignante, les dialogues dans Ari deviennent parfois off, comme si la conversation se poursuivait autrement – incarnant un détachement mélancolique. La réalisatrice sait mettre en scène une mélancolie urbaine dans ses décors du nord de la France. Son regard chaleureux étreint un personnage à la masculinité d’un type un peu différent. Par ailleurs, raconter l’histoire d’un garçon devenu SDF en laissant une large place à sa vie d’avant témoigne d’un regard empathique précieux. Tout cela est incarné par une distribution impeccable, Andranic Manet en tête.
La chaleur, la douceur, Ari la trouve également dans l’importance donnée à la culture : la poésie, le théâtre, les musées, une peinture devant laquelle on peut rester planté deux heures. Le film évoque parfois la grâce de Mia Hansen-Love et ses personnages de losers, ou considérés comme tels, qui n’apprennent pas facilement. « Tu sors d’où ? T’as pensé quoi de la vie ? », assène t-on au protagoniste fragile. Ari lui laisse ses chances et de quoi respirer, alors que tout dans le monde le contraint à vivre en apnée.
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par Nicolas Bardot