Le mode de vie et les croyances des Ayoreo ont été balayés par l’évangélisation qui les a forcés à quitter le nomadisme et la forêt pour les campements. Depuis les années 1970, Mateo Sobode Chiqueno, un vieil homme entre deux mondes, enregistre sur cassettes audio les chants ancestraux et récits de son peuple, notamment ceux de la “chasse à l’Indien”, dans une tentative de sauvegarder des traces d’une culture en train de disparaître…
Apenas el sol
Paraguay, 2021
De Arami Ullón
Durée : 1h15
Sortie : –
Note :
UNE HISTOIRE DE LA VIOLENCE
« Quand tu enregistres quelque chose, ça signifie que tu en prends soin » : c’est ce que l’une des interlocutrices confie à Mateo, qui enregistre les témoignages et expériences de ses semblables. Dans Apenas el sol, Arami Ullón filme et transmet l’histoire des Ayoreo vivant ou survivant au Paraguay. Parmi eux, Mateo entend conserver la trace d’une culture ancestrale avec lui-même un moyen qui semble aussi fragile qu’anachronique : un magnétophone.
Le récit est édifiant, à la fois méconnu mais prévisible : les populations ont été déplacées et exterminées par des missionnaires chrétiens. On raconte la panique lors d’apparitions d’hommes blancs, on raconte également les maladies apportées par ces derniers et qui ont atteint et tué des Ayoreo. Quel péché ce peuple a-t-il commis pour être chassé de son paradis ?
Apenas el sol examine la question de l’assimilation forcée : les Ayoreo deviennent-ils blancs en changeant de mode de vie ? Ullón met en lumière les multiples violences subies : la violence physique d’une part, mais aussi la violence de l’effacement d’une culture, une violence qui consiste à faire en sorte que les Ayoreo aient honte de leur culture. Les moments de silence s’imposent dans Apenas en sol. Mais tout rappelle ce qui s’est passé : les plans de nature mais surtout les plans de barrières posées dans la nature, les plans d’animaux mais surtout d’animaux morts. Sur les papiers officiels, l’identité des Ayoreo est effacée tandis que les individus déracinés se retrouvent ici comme des arbres coupés.
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par Nicolas Bardot