
Après vingt ans de recherches infructueuses dans une forêt du Cameroun, le Français Michel Ballot est sur le point d’abandonner la quête de sa vie : celle du mystérieux Mokélé-Mbembé. Il fait alors appel à des initiés et se lance, tiraillé entre la preuve scientifique et la puissance des sages, dans un ultime voyage fait de pouvoirs, de savoirs et d’invisible.

Anamocot
France, 2025
De Marie Voignier
Durée : 1h31
Sortie : –
Note :
INCERTAIN REGARD
En 2011, la documentariste française Marie Voignier réalisait L’Hypothèse du Mokélé Mbembé, portrait du cryptozoologue Michel Ballot tourné dans la jungle du Cameroun. Evoquant par moments un found footage, ce film composé d’images glanées par Ballot lui-même suivait sa recherche du Mokélé Mbembé, un mystérieux animal que nul hormis les autochtones n’a jamais réussi à voir de ses propres yeux, et encore moins à filmer. Quatorze ans plus tard, le duo se reforme alors que Ballot, suite à deux décennies d’enquête infructueuse, s’apprête à abandonner le rêve de sa vie, mais pas sans un ultime essai.
Cette fois-ci le Mokélé Mbembé n’est plus une « hypothèse ». Son existence n’est pas du tout sujet à débat chez la population locale. Bien que très rare, sa présence est pour eux à la fois un fait établi et une question de foi, et Ballot et Voignier font preuve de beaucoup de respect face à cette question. A coup de caméra cachées et d’entretiens, Anamocot documente la méthode scientifique rigoureuse de Ballot ainsi que son désir sérieux et sincère de s’associer à des chercheurs camerounais. Il ne se heurte à aucune méfiance ou même aucun étonnement, mais la même réponse lui revient régulièrement : sans l’aide de la présence magique des ancêtres, impossible de distinguer la créature. « Vos yeux ne sont pas nos yeux ».
Comment filmer ce que certains yeux ne peuvent pas voir ? Ce paradoxe philosophique est moins une impasse qu’un moteur au cœur des meilleures scènes de ce documentaire qui possède par ailleurs un ventre mou où le rythme se fait un peu stagnant. Voignier fait néanmoins preuve de touches d’humour bienvenues au moment de filmer le travail concret des femmes pendant que les hommes jouent à la chasse aux fantômes. La cryptozoologie a ceci de fascinant qu’elle se trouve à cheval sur la science et la mythologie. C’est cette ambiguïté que Voignier cherche à capter, comme ces moments où l’homme de science participe avec enthousiasme à des rituels initiatiques. Ce n’est pas un hasard si le film ne porte d’ailleurs pas le nom du Mokélé Mbembé mais celui d’Anamocot, le génie qui seul peut accorder le pouvoir de vision nécessaire.
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par Gregory Coutaut