The Crossing est un premier essai sensible et prometteur réalisé par la Chinoise Bai Xue. Porté par un solide buzz en festivals, sélectionné à Toronto et à la Berlinale, The Crossing fait le beau récit d’apprentissage d’une jeune fille voyageant quotidiennement entre Hong Kong et la Chine continentale. Ce long métrage que nous vous recommandons sort le 12 août en salles.
—
Quel a été le point de départ de The Crossing ?
Avant d’entamer réellement le film, j’avais déjà l’envie de faire un portrait et ce dans une tonalité dramatique. C’est ce que j’aime. En 2015, j’ai décidé de faire le portrait d’une jeunesse traversant les frontières, ces jeunes gens qui vont de Shenzhen à Hong Kong tous les jours. Afin de mieux comprendre leur vie quotidienne, j’ai fait d’innombrables allers-retours entre ces deux régions, j’ai effectué d’interminables interviews, et j’ai pris des centaines de photos et de vidéos pour préparer la mise en scène du film. Car je crois fermement que la réussite du projet se situait dans le caractère réaliste de cette histoire.
Durant ce processus, j’ai découvert de nombreuses histoires qui m’ont touchée. Des récits d’une grande fraicheur, avec quelque chose d’unique. Il était question de conflits concernant le milieu d’origine ou l’éducation. J’ai pu rencontrer plusieurs jeunes filles dont le père était de Hong Kong et la mère de Chine continentale. Elles se sont confiées à moi avec sincérité et ont partagé des choses sur leurs vies. Lorsque je leur demandais d’où elles venaient, leurs regards restaient évasifs. Elles me répondaient : « mon identité est hongkongaise ». Elles lissent leur visage au collagène et ne ressemblent déjà plus à des jeunes filles. Elles ont bon cœur mais ont en général des problèmes familiaux. Et elles m’ont donné comme un pincement au cœur. Voilà ce qui m’a servi de moteur pour le film.
The Crossing est un récit d’apprentissage à propos d’une jeune fille, mais dans quelle mesure diriez-vous que votre film traite de la relation entre la Chine continentale et Hong Kong ?
Il y a deux backgrounds assez distincts propres à ces deux régions. Je ne m’intéresse pas en premier lieu à la politique. Mon film parle surtout de gens qui vivent avec une forme de honte. Peipei en fait partie. Ce sont des gens qui ont leur famille mais pas d’amis à Shenzhen, et qui étudient mais n’ont pas de foyer à Hong Kong. Ce sentiment de honte est en quelque sorte universel. Chaque personne immigrée, quelle que soit la ville, est confrontée à ce type de problème.
The Crossing est très beau visuellement. Comment avez-vous abordé le travail formel avec votre directeur de la photographie Piao Songri ?
Nous avons décidé de filmer Hong Kong et Shenzhen de façons différentes. A Hong Kong, nous voulions accentuer cet aspect de forêt que peut avoir la ville, et nous avons tourné caméra à l’épaule. A Shenzhen, nous avons privilégié les plans fixes pour mettre en valeur la rigidité de la vie familiale et avons essayé d’utiliser le plus souvent possible une lumière naturelle.
Quels sont vos cinéastes favoris et/ou ceux qui vous inspirent ?
J’aime Alejandro González Iñárritu, les frères Dardenne et Hirokazu Kore-Eda. Ils sont très doués pour composer des personnages tout en soignant l’atmosphère de leurs films.
Quelle est la dernière fois où vous avez eu le sentiment de voir quelque chose de neuf, de découvrir un nouveau talent ?
J’ai récemment visité une exposition consacrée à l’artiste Xu Bing. Son travail mêle les cultures orientales et occidentales et cela a totalement ouvert mes horizons.
Entretien réalisé par Nicolas Bardot le 13 mars 2019. Un grand merci à Mengchen Wen.
| Suivez Le Polyester sur Twitter, Facebook et Instagram ! |