Sundance | Critique : Brides

Deux adolescentes fugueuses doivent faire face à ce qu’elles ont laissé derrière elles afin de se reconstruire.

Brides
Royaume-Uni, 2025
De Nadia Fall

Durée : 1h33

Sortie : –

Note :

A L’AVENTURE

Les adolescentes Doe et Muna sont en voyage. Quand débute le film, elles sont déjà dans le train pour l’aéroport, pouffant et trépignant d’excitation à l’idée d’un voyage qui, on le comprend rapidement, va se dérouler clandestinement dans le dos de leur famille, comme une école buissonnière puissance mille. Brides a de l’énergie à revendre et ne perd pas de temps, l’avion a à peine décollé de Londres pour rejoindre Istanbul que l’on devine pourtant derrière les sourires des héroïnes une certaine nervosité : pourquoi Muna déconseille-t-elle si fortement à Doe de répondre au téléphone ?

Brides (soit épouses en anglais), le titre de ce premier film de la cinéaste britannique Nadia Fall, semble vendre la mèche trop rapidement, mais le scénario possède de la ressource. Une série de flashbacks, brefs comme des mauvais souvenirs qu’on souhaite balayer, nous apprend progressivement que ces deux jeunes filles avides de liberté mais pas encore débarrassées de toute candeur enfantine sont musulmanes, et que leur quotidien dans un environnement majoritairement blanc n’a rien d’un lit de roses. Doe et Muna cherchent-elles à traverser « la frontière » (laquelle, ce n’est délibérément pas précisé) pour aller devenir des épouses en Syrie ? La réponse n’est jamais donnée clairement et, si quelques indices paraissent le confirmer, le mot ISIS n’est pas prononcé une seule fois, et le film se concentre intégralement sur leur voyage, laissant leur destination hors-champ.

Ce n’est pas que Brides joue petit bras au moment de traiter ce sujet grave qui, de Profile au récent Rabia, a déjà été filmé de bien de manières diverses. La réalisatrice Nadia Fall choisit au contraire de rester collé à des héroïnes attachantes et de faire de leur voyage un road movie électrisant et chaleureux à la fois. Le récit suit des étapes classiques du genre, les héroïnes passant d’une rencontre et d’une mauvaise décision à l’autre, et la forme est presque pop, ajoutant à son flux de flashbacks des extraits de journaux télés, vidéos Youtube et quelques tubes. Aussi improbable que cela paraisse sur le papier, Brides possède en effet tout le potentiel d’un crowdpleaser.

La réussite du film n’est pas seulement d’être très plaisant à suivre, c’est de parvenir à raconter la naïveté du parcours de ces protagonistes d’une part sans faire preuve de naïveté coupable face à cette situation dramatique (l’ensemble n’est pas exempt de quelques facilités mais on n’est pas non plus face à une comédie), et d’autre part sans regarder ces filles-là de haut. La structure narrative, qui nous en apprend de plus en plus sur leurs parcours respectifs, en fait des personnages de plus en plus vivants et nuancés. Deux compliments que l’on peut faire au film dans son ensemble.

| Suivez Le Polyester sur Twitter, Facebook et Instagram ! |

par Gregory Coutaut

Partagez cet article