Critique : Shimoni

Après 7 ans de prison, Geoffrey, 35 ans, doit recommencer sa vie à Shimoni. Là, il reste caché dans l’église catholique locale. Puis, un dimanche après la messe, Geoffrey le voit. Le monstre l’a trouvé.

Shimoni
Kenya, 2024
De Angela Wanjiku Wamai

Durée : 1h37

Sortie : 22/01/2025

Note :

PAS DE PITIÉ POUR LES CROYANTS

Lorsque débute le récit de Shimoni, Geoffrey sort de prison à Nairobi. Les raisons de son incarcération nous sont alors inconnues et, choix scénaristique efficace, elles le restent pendant toute une partie du film. Tout juste sait-on qu’il s’agit d’un crime « innommable » si l’on en croit les rumeurs qui se chuchotent autour de lui. En rupture avec sa famille et son entourage, Geoffrey n’a d’autre choix que d’accepter la proposition d’un prêtre autoritaire : aller refaire sa vie dans un village isolé pour apprendre à se repentir. Quelques minutes se sont à peine déroulées que Geoffrey réalise avec effroi qu’il est en réalité ramené dans son village natal : Shimoni.

Shimoni est ce qu’on appelle un slow burner, c’est à dire un film dont le relief ne se dévoile par d’emblée. De fait, la première partie du film se déroule sur un rythme très placide, tout en suivant un récit relativement minimaliste à force de non-dits. L’atout principal de cette mise en jambe un peu trop longue est son protagoniste. Paralysé par une colère et une peur à l’origine mystérieuse, Geoffrey est comme hanté, pétrifié de claustrophobie alors même qu’il a quitté la prison pour la campagne. Pour son premier long métrage, la cinéaste kenyane Angela Wamai se paye le joli culot de nous attacher à un personnage pas forcément aimable.

Ce n’est pourtant pas un hasard si le film porte le nom du village plutôt que celui du protagoniste. Derrière ce portrait d’homme complexe et ce scénario qui invite (simplement mais intelligemment) à repenser les préjugés et le droit au repentir, se trouve un autre tableau au relief plus cruel. A coups de personnages secondaires réussis (dont une irrésistible fermière commère) et de détails bien vus (le swahili laisse place à l’anglais selon les situations sociales), Wamai brosse le portrait de l’obscurantisme violent qui peut se cacher derrière les bonnes consciences chrétiennes et dans les communautés religieuses fermées sur elles-mêmes. De film social au léger suspens, Shimoni se transforme alors en tragédie où chacun est prisonnier à sa manière.

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par Gregory Coutaut

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