Festival de Busan | Critique : Ma – Cry of Silence

Mi-Thet, une jeune Myanmaraise qui travaille dans une usine de confection, se retrouve prise dans un mouvement de grève organisé par ses collègues, réveillant en elle un profond traumatisme. 

Ma – Cry of Silence
Myanmar, 2024
De The Maw Naing

Durée : 1h14

Sortie : –

Note :

LES DAMNÉES NE PLEURENT PAS

Poète et plasticien, le Myanmarais The Maw Naing a signé un premier long métrage intitulé The Monk qui fut montré en France au Festival de la Rochelle il y a dix ans. Son nouveau film, Ma – Cry of Silence fait sa première mondiale dans la compétition du Festival de Busan. Le film s’ouvre par une crainte assez éloquente avec une voix féminine qui s’interroge : « Est-ce qu’on sort des ténèbres, ou est-ce qu’on s’y précipite ? ». The Maw Naing s’inspire de faits réels et relate un mouvement de grève mené par des ouvrières d’une petite usine textile. Le tournage, lui-même, s’est révélé dangereux et la démarche courageuse de Ma – Cry of Silence est déjà à saluer.

Le réel s’invite également dans le long métrage avec des images d’archives montrant la répression violente menée par les autorités dans les zones rurales. Voilà qui est peut-être la principale limite du film, où les images de fiction ne retrouvent pas l’urgence des images documentaires. The Maw Naing privilégie une mise en scène épurée, il filme attentivement les gestes de la vie quotidienne au matin. Les nouvelles alarmantes de villages aux alentours parviennent par la radio, mais on a à peine le temps de les entendre qu’un cut nous emmène en usine où les protagonistes travaillent d’arrache-pied. Là encore, l’autorité exploite, et celle-ci n’a pas de visage – seulement la voix d’un homme. Celui-ci peut être hors champ, on peut n’en voir que le dos, ou l’ombre. Ce choix de représentation ouvre l’allégorie de Ma – Cry of Silence.

« Il n’y a pas de loi qui protège les plus faibles, et beaucoup se retrouvent piégées dans un cercle de désespoir », commente le réalisateur. De fait, l’autorité dans Ma ne connaît que la matraque, le sabre, le feu ou les poings. The Maw Naing et sa scénariste coréenne Oh Young-jeong ne racontent même pas la lutte d’ouvrières qui espèreraient obtenir des conditions de travail meilleures : leurs héroïnes souhaitent tout simplement… être payées pour leur travail, ce qui semble déjà être une exigence inadmissible. The Maw Naing filme les nombreuses cicatrices sur le dos d’un protagoniste, ou plus tard les ouvrières derrière les grilles de leur usine qui ressemblent comme deux gouttes d’eau à des barreaux de prison. Dans ce témoignage humble et édifiant, à quoi les héroïnes songent-elles encore la nuit ?

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par Nicolas Bardot

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